Leçon n°5 - Médias et opinion publique
dans les grandes crises politiques en France depuis l'Affaire Dreyfus
(cliquez sur les titres des parties et des paragraphes pour faire apparaître le texte et les documents de la leçon)
L’opinion publique, c’est-à-dire l‘ensemble des convictions, des jugements et des valeurs d’une société à une époque donnée, est indissociable de l’avènement de la démocratie. Depuis la fin du XIXe siècle, les médias (la presse écrite, puis la radio à partir des années 1920, la télévision à partir des années 1950, Internet depuis les années 1990) contribuent à la formation et à l’expression de l’opinion publique en France. Cela est particulièrement visible lors des moments de brutale tension qui ont marqué la vie politique française depuis un siècle.
En quoi les crises politiques que la France a connues depuis la fin du XIXe siècle permettent-elles de montrer comment les médias forment et orientent l’opinion publique ?
I. La presse et son rôle de l’Affaire Dreyfus au 6 février 1934
1. La « Belle époque » (1890-1914) : l’âge d’or de la presse à grand tirage
a) L’avènement de la IIIe République donne une liberté presque complète à la presse écrite. La loi du 29 juillet 1881 fait de la liberté de la presse une valeur fondamentale de la République. Le contrôle du pouvoir politique sur la presse et la censure disparaissent, seule la diffamation est interdite (document 1). Ce régime très libéral, qui reste intact jusqu’à la fin de la IIIe République, n’est interrompu que par des circonstances exceptionnelles. L’assassinat du président Sadi Carnot en 1894 est suivi par le vote de lois interdisant la diffusion dans la presse des idées anarchistes ; le déclenchement de la Première Guerre mondiale place la presse sous le contrôle de l’armée, qui censure les informations susceptibles d’affaiblir le moral de l’arrière et qui diffuse des informations complaisantes et mensongères: le « bourrage de crâne » (document 2).
b) La lecture des journaux devient une pratique générale à la fin du XIXe siècle. Des inventions comme la presse rotative (1872) ou la linotype (1887) permettent d’abaisser les coûts de fabrication et donc le prix de vente des journaux ; le télégraphe et le téléphone accélèrent la transmission de l’information, tandis que le chemin de fer permet de diffuser des journaux sur tous les points du territoire (document 3). Par ailleurs, la généralisation de l’instruction, réalisée par les lois Ferry de 1880-1881, fait de la lecture des journaux une pratique individuelle, alors qu’elle était jusque-là le plus souvent collective. En 1914, l80 quotidiens sont publiés à Paris et 242 en province pour un total de près de 10 millions d’exemplaires (document 4).
c) La presse populaire, la plus lue, coexiste avec une très diverse presse d’opinion. La presse de la Belle Epoque est dominée par les quotidiens populaires à très grand tirage, comme Le Petit Journal (1 400 000 exemplaires en 1914) ou Le Petit Parisien (800 000 exemplaires). Ces journaux, abondamment illustrés, contiennent surtout des récits de faits divers, des chroniques sportives, quelques reportages et des romans feuilletons (document 5). La presse d’opinion, moins diffusée, reflète la diversité des courants politiques de la IIIe République : la gauche (L'Humanité pour les socialistes, L'Aurore pour les radicaux), le centre (Le Temps ou Le Figaro), la droite (La Croix) ou l’extrême-droite (L’Action française) (document 6).
Des conditions politiques très favorables
La loi du 29 juillet 1881
Article 1 : L'imprimerie et la librairie sont libres.
Article 2 : Tout écrit rendu public portera l'indication du nom et du domicile de l'imprimeur à peine, contre celui-ci, d'une amende de 360 à 8000 francs. La distribution des imprimés qui ne porteraient pas la mention exigée au paragraphe précédent est interdite et la même peine est applicable à ceux qui contreviendraient à cette interdiction.
Une peine d'emprisonnement d'un mois à six mois pourra être prononcée si, dans les douze mois précédents, l'imprimeur ou le distributeur a été condamné pour contravention de même nature.Toutefois, si l'imprimé fait appel à des techniques différentes et nécessite le concours de plusieurs imprimeurs, l'indication du nom et du domicile de l'un d'entre eux est suffisant.
Article 5 : Tout journal ou écrit périodique peut être publié sans autorisation préalable est sans dépôt de cautionnement, après la déclaration prescrite par l'article 7.
Article 6 : Tout journal ou écrit périodique doit avoir un directeur de la publication
Un contexte économique et social également favorable
Un contexte économique et social également favorable
L'âge du papier, gravure de Felix Vallotton, 1898
Deux sortes de presse
Quelques « unes » de la presse populaire de la « Belle époque »
Deux sortes de presse
Les diffusions très différentes de la presse populaire et de la presse d'opinion
a) Des conditions politiques très favorables
Des conditions politiques très favorables
La loi du 29 juillet 1881
Article 1 : L'imprimerie et la librairie sont libres.
Article 2 : Tout écrit rendu public portera l'indication du nom et du domicile de l'imprimeur à peine, contre celui-ci, d'une amende de 360 à 8000 francs. La distribution des imprimés qui ne porteraient pas la mention exigée au paragraphe précédent est interdite et la même peine est applicable à ceux qui contreviendraient à cette interdiction.
Une peine d'emprisonnement d'un mois à six mois pourra être prononcée si, dans les douze mois précédents, l'imprimeur ou le distributeur a été condamné pour contravention de même nature.Toutefois, si l'imprimé fait appel à des techniques différentes et nécessite le concours de plusieurs imprimeurs, l'indication du nom et du domicile de l'un d'entre eux est suffisant.
Article 5 : Tout journal ou écrit périodique peut être publié sans autorisation préalable est sans dépôt de cautionnement, après la déclaration prescrite par l'article 7.
Article 6 : Tout journal ou écrit périodique doit avoir un directeur de la publication
b) Un contexte économique et social également favorable
Un contexte économique et social également favorable
Un contexte économique et social également favorable
L'âge du papier, gravure de Felix Vallotton, 1898
Deux sortes de presse
Les diffusions très différentes de la presse populaire et de la presse d'opinion
2. La presse écrite au centre de l’Affaire Dreyfus
a) Il ne s’agit au départ que d’une affaire d’espionnage dévoilée par la presse. Au début de novembre 1894 , les journaux annoncent l’arrestation d’un officier de l’État-major de l’armée, accusé d’avoir fourni des renseignements à l’Allemagne. Qu’il s’agisse d’affaires d’espionnage ou de scandales politico-financiers (comme l’Affaire de Panama en 1892), la presse de l’époque est très friande de ce genre d’information, qu’elle peut traiter en feuilletons à épisodes et à rebondissements (document 1). C’est donc très largement qu’elle relate l’arrestation et la condamnation du capitaine Dreyfus, puis sa dégradation et sa déportation au bagne en Guyane. Influencés par le journal antisémite La Libre parole, les journaux ne manifestent aucun doute sur la culpabilité de Dreyfus, surnommé « Judas » ou « le traitre » (document 2).
b) La presse fait de l’Affaire Dreyfus une crise politique majeure. A partir de 1897, à l’initiative du frère de Dreyfus et à la suite de la découverte de nouveaux documents accablant le commandant Esterhazy, le vrai coupable de l’Affaire, quelques journaux, dont Le Figaro, prennent le parti de Dreyfus. Cette offensive des « dreyfusards » se heurte à la résistance de l’armée qui refuse de se déjuger : un tribunal militaire acquitte Esterhazy en janvier 1898 (document 3). En réaction, Emile Zola publie dans L’Aurore une lettre au Président de la République intitulée « J’accuse », dans laquelle il dénonce les officiers qui ont fait à tort condamner un innocent. Il commet ainsi volontairement le délit de diffamation prévu par la loi de 1881 pour obtenir un procès et faire enfin éclater la vérité (document 4). Les « antidreyfusards » se déchainent alors contre celui qui porte atteinte à l’honneur de l’armée (document 5).
c) Orientée par la presse, l’opinion publique se partage entre partisans et adversaires de Dreyfus. L’année 1899 conduit à leur maximum les tensions qui entourent l’Affaire Dreyfus. La presse antidreyfusarde encore majoritaire doit faire face aux progrès des idées dreyfusardes dans l’opinion, tandis que l’extrême-droite nationaliste et antisémite multiplie les manifestations violentes pour empêcher toute révision du procès de Dreyfus (document 6). Le dessin de Caran d’Ache (« Surtout ne parlons pas de l’Affaire Dreyfus » – « Ils en ont parlé ») résume à lui seul cette fracture de l’opinion publique (document 7). Ces tensions s’atténuent lorsque Dreyfus, à nouveau jugé et condamné en septembre 1899, est gracié par le président de la République, puis définitivement innocenté en 1906 (document 8). Les divisions créées par l’Affaire Dreyfus au sein de l’opinion ne disparaissent pas pour autant : le clivage droite/gauche est né.
Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
Le traitement prudent de certains journaux
Des présomptions sérieuses ont motivé l'arrestation provisoire d'un officier français soupçonné d'avoir communiqué à des étrangers quelques documents peu importants. Il faut qu'on sache très vite la vérité.Le Figaro, 1er novembre 1894
La « une » de La Presse, le 1er novembre 1894
Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Le combat des premiers partisans de l'innocence de Dreyfus,
caricature publiée dans Le Grelot du 19 décembre 1897
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Monsieur le Président,
Me permettez-vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que vous m'avez fait un jour, d'avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu'ici, est menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches ?
Vous êtes sorti sain et sauf des basses calomnies, vous avez conquis les cœurs. Vous apparaissez rayonnant dans l'apothéose de cette fête patriotique que l'alliance russe a été pour la France, et vous vous préparez à présider au solennel triomphe de notre Exposition universelle, qui couronnera notre grand siècle de travail, de vérité et de liberté. Mais quelle tache de boue sur votre nom - j'allais dire sur votre règne - que cette abominable affaire Dreyfus ! Un conseil de guerre vient, par ordre, d'oser acquitter un Esterhazy, soufflet suprême à toute vérité, à toute justice. Et c'est fini, la France a sur la joue cette souillure, l'histoire écrira que c'est sous votre présidence qu'un tel crime social a pu être commis.
Puisqu'ils ont osé, j'oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai, car j'ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l'innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu'il n'a pas commis.
Et c'est à vous, monsieur le Président, que je la crierai, cette vérité, de toute la force de ma révolte d'honnête homme. Pour votre honneur, je suis convaincu que vous l'ignorez. Et à qui donc dénoncerai-je la tourbe malfaisante des vrais coupables, si ce n'est à vous, le premier magistrat du pays ?
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.
J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.
J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.
J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un but politique, et pour sauver l'état-major compromis.
J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.
J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une enquête scélérate, j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.
J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement.
J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse, particulièrement dans L'Eclair et dans L'Echo de Paris, une campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir leur faute.
J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j'accuse le second conseil de guerre d'avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d'acquitter sciemment un coupable.
En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30 et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c'est volontairement que je m'expose.
Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter l'explosion de la vérité et de la justice.
Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour !
J'attends.
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Une presse et une opinion publique coupées en deux
Une opinion publique divisée: le dessin de Caran D’Ache,
publié dans Le Figaro du 14 février 1898
Une presse et une opinion publique coupées en deux
Une majorité de journaux longtemps antidreyfusards
Une presse et une opinion publique coupées en deux
L'épilogue de l'Affaire: l'acquittement de Dreyfus en 1906
a) Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
Le traitement prudent de certains journaux
Des présomptions sérieuses ont motivé l'arrestation provisoire d'un officier français soupçonné d'avoir communiqué à des étrangers quelques documents peu importants. Il faut qu'on sache très vite la vérité.Le Figaro, 1er novembre 1894
La « une » de La Presse, le 1er novembre 1894
Une affaire d’espionnage dévoilée par la presse
b) Une affaire devenue politique grâce à la presse
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Le combat des premiers partisans de l'innocence de Dreyfus,
caricature publiée dans Le Grelot du 19 décembre 1897
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Monsieur le Président,
Me permettez-vous, dans ma gratitude pour le bienveillant accueil que vous m'avez fait un jour, d'avoir le souci de votre juste gloire et de vous dire que votre étoile, si heureuse jusqu'ici, est menacée de la plus honteuse, de la plus ineffaçable des taches ?
Vous êtes sorti sain et sauf des basses calomnies, vous avez conquis les cœurs. Vous apparaissez rayonnant dans l'apothéose de cette fête patriotique que l'alliance russe a été pour la France, et vous vous préparez à présider au solennel triomphe de notre Exposition universelle, qui couronnera notre grand siècle de travail, de vérité et de liberté. Mais quelle tache de boue sur votre nom - j'allais dire sur votre règne - que cette abominable affaire Dreyfus ! Un conseil de guerre vient, par ordre, d'oser acquitter un Esterhazy, soufflet suprême à toute vérité, à toute justice. Et c'est fini, la France a sur la joue cette souillure, l'histoire écrira que c'est sous votre présidence qu'un tel crime social a pu être commis.
Puisqu'ils ont osé, j'oserai aussi, moi. La vérité, je la dirai, car j'ai promis de la dire, si la justice, régulièrement saisie, ne la faisait pas, pleine et entière. Mon devoir est de parler, je ne veux pas être complice. Mes nuits seraient hantées par le spectre de l'innocent qui expie là-bas, dans la plus affreuse des tortures, un crime qu'il n'a pas commis.
Et c'est à vous, monsieur le Président, que je la crierai, cette vérité, de toute la force de ma révolte d'honnête homme. Pour votre honneur, je suis convaincu que vous l'ignorez. Et à qui donc dénoncerai-je la tourbe malfaisante des vrais coupables, si ce n'est à vous, le premier magistrat du pays ?
Une affaire devenue politique grâce à la presse
Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.
J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.
J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.
J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un but politique, et pour sauver l'état-major compromis.
J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.
J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une enquête scélérate, j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.
J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement.
J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse, particulièrement dans L'Eclair et dans L'Echo de Paris, une campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir leur faute.
J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j'accuse le second conseil de guerre d'avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d'acquitter sciemment un coupable.
En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30 et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c'est volontairement que je m'expose.
Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l'acte que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire pour hâter l'explosion de la vérité et de la justice.
Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on ose donc me traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour !
J'attends.
Une affaire devenue politique grâce à la presse
c) Une presse et une opinion publique coupées en deux
Une presse et une opinion publique coupées en deux
L'épilogue de l'Affaire: l'acquittement de Dreyfus en 1906
3. Les médias et leur rôle pendant la crise du 6 février 1934
a) L’entre-deux-guerres renouvelle le paysage médiatique français. Inventée à la fin du XIXe siècle, la radio, nommée la TSF (« transmission sans fil »), équipe 60% des foyers français en 1939. Contrôlée par l’État, elle s’écoute en famille et devient la principale source de divertissement des années 1930 (document 1). La presse écrite est, quant à elle, affaiblie et discréditée: accusés d’avoir désinformé l’opinion pendant la guerre et confrontés à de grandes difficultés économiques, près de la moitié des titres publiés en 1914 disparaissent après 1918. Ceux qui restent tentent de restaurer leur crédibilité, en adoptant une attitude critique vis-à-vis du pouvoir et en dénonçant les nombreux scandales politiques de l’époque (document 2). La presse contribue ainsi à la montée de l’antiparlementarisme, très présent dans l’opinion française au début des années 1930 (document 3).
b) La presse écrite est à l’origine de l’affaire Stavisky. A la fin de 1933, une escroquerie organisée par Alexandre Stavisky avec la complicité de plusieurs ministres et parlementaires est dévoilée (document 4). Mais cette affaire ne prend toute son ampleur que le 8 janvier 1934, lorsque Stavisky est trouvé mort à Chamonix par la police venue l’arrêter : si de nombreux journaux (Le Petit Parisien ou Le Figaro) reprennent la thèse du suicide mise en avant par le gouvernement (document 5), la presse d’extrême-droite (L’Action Française) ou d’extrême-gauche (L’Humanité) accuse celui-ci d’avoir fait assassiner Stavisky pour l’empêcher de dénoncer les complicités dont il a bénéficié (document 6). Une violente campagne de presse (« A bas les voleurs ! A bas les assassins ! ») provoque jusqu’à la fin janvier de nombreuses manifestations qui forcent le gouvernement à démissionner.
c) La manifestation du 6 février 1934 débouche sur une crise politique majeure. Organisée par des ligues d’extrême-droite (les Croix de Feu, Solidarité Française, les Jeunesses Patriotes ou l’Action Française) et par des organisations d’anciens combattants (qui ont un rôle politique important dans l’entre-deux-guerres), cette manifestation doit aboutir à la Chambre des Députés pour dénoncer la complicité du gouvernement qui vient d’être créé avec celui qui vient de démissionner (document 7). Mais elle donne lieu sur la place de la Concorde à des affrontements extrêmement violents avec la police : on compte 12 morts et plus de mille blessés. Cette émeute pousse le nouveau gouvernement à la démission (document 8).
d) Les médias rendent très différemment compte de ce qui se passe le 6 février 1934. Si les actualités projetées dans les cinémas (un média très populaire dans les années 1930) ne montrent presque rien faute de moyens techniques suffisants, de nombreuses photographies – notamment celles que publient les revues de photojournalisme –, rendent visible la violence des affrontements (document 9). De son côté, la radio d’État se contente de retransmettre, après avoir attendu la fin de l’opéra diffusé ce soir-là, un communiqué du gouvernement insistant sur le maintien de l’ordre public (document 10). C’est donc la presse écrite qui donne les comptes-rendus les plus complets de la manifestation, de son bilan et de ses conséquences, mais qui oriente aussi l’opinion avec deux interprétations radicalement différentes : pour la presse d’extrême-droite, le gouvernement a fait tirer sur des Français venus clamer leur indignation ; pour les journaux de gauche, la manifestation était une tentative de coup d’État fasciste qui a échoué (document 11). C’est le point de départ de la formation du Front Populaire, contre lequel l’extrême-droite se déchaine jusqu’à la fin des années 1930.
Des médias renouvelés après la Première Guerre mondiale
Un nouveau média: la TSF
Un média qui s'écoute en famille
Des progrès très rapides dans les années 1930
Des médias renouvelés après la Première Guerre mondiale
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Une affaire d'escroquerie, couverte par de nombreuses complicités politiques
La « une » du Matin, le 7 janvier 1934
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Au centre du scandale:
Serge Alexandre Stavisky, dit « le beau Sacha »
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Le tournant de l'Affaire: la mort de Stavisky
La « une » du Figaro, le 9 janvier 1934
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Une thèse aussi rapidement remise en cause:
La « une » du Canard Enchaîne, le 10 janvier 1934
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Les accusations de la presse d'extrême-gauche
La « une » du L'Humanité, le 9 janvier 1934
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Les accusations de la presse d'extrême-droite
La « une » du L'Action Française, le 9 janvier 1934
La manifestation du 6 février 1934
Les ligues d'extrême-droite des années 1930
Les Croix de Feu
Solidarité française
Le Francisme
La manifestation du 6 février 1934
Le trajet des différents cortèges de la manifestation
La manifestation du 6 février 1934
Un bilan très lourd et des conséquences politiques majeures
Les comptes-rendus des différents médias
Le compte-rendu des Actualités cinématographiques
Voir la vidéo
Les comptes-rendus des différents médias
Les comptes-rendus des différents médias
La nuit du 6 février 1934, le réseau d'État attend la fin de l'opéra en cours pour retransmettre ce communiqué de la présidence du Conseil.
L'appel au calme et au sang-froid que le gouvernement avait lancé ce matin par la voie de la presse a été entendu par les anciens combattants qui se sont refusés à s'associer aux agitateurs professionnels. Par contre, certaines ligues politiques ont multiplié les excitations à l'émeute et tenté un coup de force contre le régime républicain. Des bandes armées de revolvers et de couteaux ont assailli les gardiens de la paix, les gardes républicains et les gardes mobiles. Elles ont ouvert le feu sur les défenseurs de l'ordre ; de nombreux agents ont été blessés.
La preuve est faite, par l'identité des manifestants arrêtés, qu'il s'agissait bien d'une tentative à main armée contre la sûreté de l'État. Grâce au courage et au sang-froid des défenseurs de l'ordre, ces assauts ont été brisés. Les objectifs visés par les fauteurs de troubles n'ont pas été atteints. Les mesures nécessaires ont été prises immédiatement, afin de couper court à toute nouvelle tentative.
Conscient de son devoir envers le pays qui réclame l'ordre et la paix, le gouvernement est résolu à assurer, par tous les moyens que lui confère la loi, la sécurité de la population et l'indépendance du régime républicain. Il compte, pour l'aider dans cette tâche, sur la collaboration du peuple français qui, loin de se courber devant les prétentions d'une audacieuse minorité, demeure fermement attaché à ses institutions de liberté.
Communiqué du président du Conseil Edouard Daladier
diffusé le 6 février 1934 sur Radio-Paris.
Les comptes-rendus des différents médias
Les comptes-rendus très factuels de la presse à grand tirage: la « une » de Paris-Soir, le 8 février 1934
Les comptes-rendus des différents médias
Hier soir, Paris a vu une chose inouïe. Pour défendre les pourris, le bandit Frot [ministre de l’Intérieur] et le franc-maçon Bonnefoy-Sibour [préfet de police] ont fait mitrailler la foule indignée qui venait autour du Palais Bourbon clamer son indignation, exiger la justice et la démission d’un régime qui s’enfonce dans la boue et dans le sang. Les plus formidables forces de police qu’on ait jamais vues étaient debout, armées pour la garde d’une bande de scélérats, dressées, excitées contre un peuple généreux.
L'Action Française, le 7 février 1934
Les comptes-rendus des différents médias
Le coup de force fasciste a échoué. Les bandes fascistes composées de Camelots du Roy, de « Croix de Feu », de Jeunesses patriotes, ont attaqué, avec une sauvagerie inouïe, le service d'ordre à coup de matraques, de rasoirs et de revolvers. La police et la garde mobile (les « sauveurs de la République) ont tiré sur leurs agresseurs. [...] Il y a 29 morts dont plusieurs gardes mobiles et un capitaine. [...]
C'était une véritable émeute, préparée, organisée avec soin, avec méthode par les formations fascistes. C'était un complot armé contre le régime républicain. Il a échoué. [...] Hélas ! La classe ouvrière est divisée. Elle était hier encore divisée. Le sera-t-elle encore aujourd'hui, demain ?
Le Populaire, le 7 février 1934
a) Des médias renouvelés après la Première Guerre mondiale
Des médias renouvelés après la Première Guerre mondiale
Un nouveau média: la TSF
Un média qui s'écoute en famille
Des progrès très rapides dans les années 1930
b) La presse au cœur de l’affaire Stavisky
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Une affaire d'escroquerie, couverte par de nombreuses complicités politiques
La « une » du Matin, le 7 janvier 1934
La presse au cœur de l’affaire Stavisky
Les accusations de la presse d'extrême-droite
La « une » du L'Action Française, le 9 janvier 1934
c) La manifestation du 6 février 1934
La manifestation du 6 février 1934
Les ligues d'extrême-droite des années 1930
Les Croix de Feu
Solidarité française
Le Francisme
La manifestation du 6 février 1934
Un bilan très lourd et des conséquences politiques majeures
d) Les comptes-rendus des différents médias
Les comptes-rendus des différents médias
Le compte-rendu des Actualités cinématographiques
Voir la vidéo
Les comptes-rendus des différents médias
La nuit du 6 février 1934, le réseau d'État attend la fin de l'opéra en cours pour retransmettre ce communiqué de la présidence du Conseil.
L'appel au calme et au sang-froid que le gouvernement avait lancé ce matin par la voie de la presse a été entendu par les anciens combattants qui se sont refusés à s'associer aux agitateurs professionnels. Par contre, certaines ligues politiques ont multiplié les excitations à l'émeute et tenté un coup de force contre le régime républicain. Des bandes armées de revolvers et de couteaux ont assailli les gardiens de la paix, les gardes républicains et les gardes mobiles. Elles ont ouvert le feu sur les défenseurs de l'ordre ; de nombreux agents ont été blessés.
La preuve est faite, par l'identité des manifestants arrêtés, qu'il s'agissait bien d'une tentative à main armée contre la sûreté de l'État. Grâce au courage et au sang-froid des défenseurs de l'ordre, ces assauts ont été brisés. Les objectifs visés par les fauteurs de troubles n'ont pas été atteints. Les mesures nécessaires ont été prises immédiatement, afin de couper court à toute nouvelle tentative.
Conscient de son devoir envers le pays qui réclame l'ordre et la paix, le gouvernement est résolu à assurer, par tous les moyens que lui confère la loi, la sécurité de la population et l'indépendance du régime républicain. Il compte, pour l'aider dans cette tâche, sur la collaboration du peuple français qui, loin de se courber devant les prétentions d'une audacieuse minorité, demeure fermement attaché à ses institutions de liberté.
Communiqué du président du Conseil Edouard Daladier
diffusé le 6 février 1934 sur Radio-Paris.
Les comptes-rendus des différents médias
Hier soir, Paris a vu une chose inouïe. Pour défendre les pourris, le bandit Frot [ministre de l’Intérieur] et le franc-maçon Bonnefoy-Sibour [préfet de police] ont fait mitrailler la foule indignée qui venait autour du Palais Bourbon clamer son indignation, exiger la justice et la démission d’un régime qui s’enfonce dans la boue et dans le sang. Les plus formidables forces de police qu’on ait jamais vues étaient debout, armées pour la garde d’une bande de scélérats, dressées, excitées contre un peuple généreux.
L'Action Française, le 7 février 1934
Les comptes-rendus des différents médias
Le coup de force fasciste a échoué. Les bandes fascistes composées de Camelots du Roy, de « Croix de Feu », de Jeunesses patriotes, ont attaqué, avec une sauvagerie inouïe, le service d'ordre à coup de matraques, de rasoirs et de revolvers. La police et la garde mobile (les « sauveurs de la République) ont tiré sur leurs agresseurs. [...] Il y a 29 morts dont plusieurs gardes mobiles et un capitaine. [...]
C'était une véritable émeute, préparée, organisée avec soin, avec méthode par les formations fascistes. C'était un complot armé contre le régime républicain. Il a échoué. [...] Hélas ! La classe ouvrière est divisée. Elle était hier encore divisée. Le sera-t-elle encore aujourd'hui, demain ?
Le Populaire, le 7 février 1934
II. Les médias et les crises politiques, de juin 1940 à mai 1968
1. Les médias et l’opinion publique divisés face à la crise de juin 1940
a) La crise de juin 1940 est le début d’une « guerre des ondes » qui dure jusqu’en 1944. La publication des journaux étant désorganisée suite à l’avancée des armées allemandes, c’est par la TSF que, le 17 juin 1940, Pétain annonce son intention de demander un armistice. C’est également par la radio, mais de Londres, que de Gaulle lui répond le lendemain en appelant les Français à poursuivre le combat (document 1). Pendant le reste de la guerre, la radio gouvernementale – Radio-Paris surtout – est le principal instrument de la propagande de Vichy (document 2), tandis que la BBC, par son émission quotidienne « les Français parlent aux Français » tente de faire passer des messages de la Résistance. Même s’ils sont brouillés par les Allemands, ceux-ci permettent de maintenir un lien entre la France Libre et la France occupée (document 3).
b) Les autres médias officiels sont étroitement contrôlés par Vichy et par les Allemands. Les titres de la presse écrite qui sont autorisés à reparaître à l’automne 1940 sont placés sous la surveillance d’un organisme gouvernemental, le Secrétariat général à l’information, dont les consignes très strictes fixent ce qui peut et ne peut pas être publié (document 4). A cette contrainte, s’ajoute celle qu’imposent les Allemands qui fournissent le papier aux journaux les plus obéissants et surtout aux journaux collaborateurs, comme Je suis partout (document 5). Ce sont également les Allemands qui produisent les actualités diffusées dans les cinémas de la France occupée, ainsi qu’une grande partie de la propagande imposée aux Français (document 6).
c) Les médias de la Résistance sont condamnés à la clandestinité. Même si elle ne dispose que de très peu de moyens, la presse résistante n’en est pas moins extrêmement active : plus de 1 000 titres sont publiés – souvent sur une seule page – de 1940 à 1944 et, à la fin de la guerre, Combat, le journal le plus diffusé, tire à 200 000 exemplaires (document 7). L’essentiel de l’activité de cette presse résistante est de fournir à l’opinion française une contre-propagande dénonçant le régime de Vichy et sa politique de collaboration avec l’occupant (document 8).
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
Pétain à la radio française, le 17 juin 1940
Ecouter son discours
De Gaulle à la BBC, le 22 juin 1940
(l'appel du 18 juin n'a pas été enregistré)
Ecouter son discours
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
La radio, un média au service de la propagande de Vichy
Pétain à la radio, le 27 juin 1941,
« Français, vous avez la mémoire courte! »
Ecouter son discours
Pierre Laval à la radio le 22 juin 1940
« Je souhaite la victoire de l'Allemagne »
Ecouter son discours
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
La radio, un média au service de la propagande de Vichy
Un discours de Pétain retransmis à la radio en 1941
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
La radio, un média au service de la Résistance
Plaque commémorative de l'émission
Les Français parlent aux Français
Ecouter un extrait
Quand la radio devient une arme de guerre:
un des nombreux émetteurs utilisés par les résistants
dans la France occupée
Des médias officiels étroitement contrôlés
Les polémiques susceptibles de créer des divisions entre les Français sont interdites.
Les critiques et attaques contre les adversaires de la politique du Maréchal sont autorisées.
Ne rien laisser passer sur de Gaulle et les émigrés en dehors des communications officielles.
Pour ce qui concerne les organes régionaux, les critiques touchant la vie locale, le ravitaillement, les administrations, pourront être admises à la condition essentielle qu’elles soient fondées et opportunes et ne puissent être interprétées comme un désaveu de la politique du Maréchal.
Les lettres de lecteurs, traitant de questions apolitiques, si elles sont conçues en termes modérés, pourront être insérées isolément.
Secrétariat général à l'Information
"Consignes générales permanentes pour la presse", 14 avril 1941
Des médias officiels étroitement contrôlés
Des médias officiels étroitement contrôlés
L'entrevue de Montoire, en octobre 1940, rapportée par les Actualités mondiales
Voir un extrait
Des médias officiels étroitement contrôlés
Une propagande majoritairement produite par les Allemands
Les médias clandestins de la Résistance
Quelques-uns des 1 000 titres publiés clandestinement pendant la guerre
Les médias clandestins de la Résistance
Les médias clandestins de la Résistance
Une contre-propagande face à celle du régime de Vichy
a) Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
Pétain à la radio française, le 17 juin 1940
Ecouter son discours
De Gaulle à la BBC, le 22 juin 1940
(l'appel du 18 juin n'a pas été enregistré)
Ecouter son discours
Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
La radio, un média au service de la propagande de Vichy
Pétain à la radio, le 27 juin 1941,
« Français, vous avez la mémoire courte! »
Ecouter son discours
Pierre Laval à la radio le 22 juin 1940
« Je souhaite la victoire de l'Allemagne »
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Une « guerre des ondes » pendant toute la guerre
La radio, un média au service de la Résistance
Plaque commémorative de l'émission
Les Français parlent aux Français
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Quand la radio devient une arme de guerre:
un des nombreux émetteurs utilisés par les résistants
dans la France occupée
b) Des médias officiels étroitement contrôlés
Des médias officiels étroitement contrôlés
Les polémiques susceptibles de créer des divisions entre les Français sont interdites.
Les critiques et attaques contre les adversaires de la politique du Maréchal sont autorisées.
Ne rien laisser passer sur de Gaulle et les émigrés en dehors des communications officielles.
Pour ce qui concerne les organes régionaux, les critiques touchant la vie locale, le ravitaillement, les administrations, pourront être admises à la condition essentielle qu’elles soient fondées et opportunes et ne puissent être interprétées comme un désaveu de la politique du Maréchal.
Les lettres de lecteurs, traitant de questions apolitiques, si elles sont conçues en termes modérés, pourront être insérées isolément.
Secrétariat général à l'Information
"Consignes générales permanentes pour la presse", 14 avril 1941
Des médias officiels étroitement contrôlés
L'entrevue de Montoire, en octobre 1940, rapportée par les Actualités mondiales
Voir un extrait
Des médias officiels étroitement contrôlés
Une propagande majoritairement produite par les Allemands
c) Les médias clandestins de la Résistance
Les médias clandestins de la Résistance
Quelques-uns des 1 000 titres publiés clandestinement pendant la guerre
Les médias clandestins de la Résistance
Une contre-propagande face à celle du régime de Vichy
2. Les médias et l’opinion publique à nouveau divisés face à la crise de mai 1958
a) La presse subit une forte épuration puis un net déclin après la Seconde Guerre mondiale. À la Libération, les journaux qui ont collaboré avec les Allemands sont interdits et de nombreux journalistes sont condamnés à mort. Ne peuvent ensuite reparaître que les titres qui ont subi la censure du régime de Vichy (Le Figaro, Le Parisien libéré ou La Croix), ceux qui sont issus de la Résistance (Combat ou Libération) et ceux qui remplacent des journaux collaborateurs (Le Monde, France-Soir, Ouest-France, L’Equipe) (document 1). Sont aussi créés de nouveaux journaux abondamment illustrés (Paris-Match en 1949) et des magazines d’information : L’Express créé en 1953, France-Observateur en 1954 (document 2). Mais ce renouvellement n’enraye pas le déclin de la presse dont les tirages passent de 6 à 3 millions d’exemplaires entre 1946 et 1952 (document 3).
b) Les médias audiovisuels profitent de ce déclin. Au début des années 1960, 80% des foyers possèdent un poste de radio, facile à utiliser et aisément transportable depuis l’invention du transistor (document 4). Très populaire, ce média reste sous le contrôle de l’État – la Radiodiffusion Française (RdF) est créée en 1945 – même si, à partir des années 1950, des radios privées, les « radios périphériques » (Europe n°1, Radio Monte-Carlo et Radio-Luxembourg), peuvent émettre depuis l’étranger (document 5). Un autre média, la télévision, commence à diffuser des informations : le premier journal télévisé est créé en 1949 ; le couronnement d’Elizabeth d’Angleterre est retransmis en 1953. Mais ce média, lui aussi contrôlé par l’État – la RdF devient la RdTF (Radiodiffusion Télévision Française) en 1949 –, est très peu regardé : seuls 1% des foyers français sont équipés d’une télévision en 1954 (document 6).
c) La crise du 13 mai 1958 met fin à la IVe République. Alors que, depuis 1954, une guerre oppose en Algérie l’armée française au FLN (Front de Libération Nationale), la formation d’un gouvernement dirigé par Pierre Pflimlin, réputé favorable à des discussions avec les indépendantistes algériens, déclenche un soulèvement des Français d’Algérie soutenus par une partie de l’armée (document 7). Tandis que le gouvernement semble désemparé, de Gaulle – éloigné du pouvoir depuis 1946 mais appelé par les insurgés d’Alger – déclare le 15 mai qu’il est prêt à « assumer les pouvoirs de la République » (document 8). Les choses vont ensuite très vite : Pflimlin ayant démissionné le 27 mai, de Gaulle est chargé par René Coty de former un gouvernement, qui, reçoit les pleins pouvoirs constitutionnels le 3 juin (document 9). C’est la fin de la IVe République.
d) Cette crise est très largement médiatisée. La presse écrite apparaît aussi divisée que l’opinion face à ce qui se passe en 1958 : le retour de de Gaulle au pouvoir, salué par la plupart des journaux (document 10), est dénoncé comme un coup d’État par la presse de gauche (L’Express, L’Observateur et L’Humanité en particulier) déjà très critique vis-à-vis de la guerre d’Algérie (document 11). Les médias audiovisuels contrôlés par l’État donnent d'abord (comme les actualités cinématographiques du 21 mai) une vision très négative des événements d’Alger, puis célèbrent la nomination de de Gaulle à la tête du gouvernement (ce que font les actualités du 7 juin). La même hésitation est visible dans les journaux télévisés de la période (document 12).
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Une presse quotidienne « épurée » et renouvelée après la guerre
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Le début d'un inexorable déclin de la presse quotidienne
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Les années 1950-1960: l’âge d'or de la radio
L'un des premiers « transistors »
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Les radios publiques, regroupées dans un organisme unique
placé sous l'autorité du gouvernement
Ecouter le générique de l'émission-culte
Salut les Copains
au style plus détendu et plus jeune
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Un nouveau média: la télévision
Un média immédiatement contrôlé par l'État
L'enfance de l'information télévisée:
voir le tout premier JT (1949)
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Une diffusion qui s'accélère seulement dans les années 1960
La fin de la IVe République
La déclaration de de Gaulle, le 15 mai 1958 à Alger:
la « une » de L'Echo d'Alger, le 16 mai
La fin de la IVe République
Une crise très largement médiatisée
Une presse algérienne très favorable au retour de De Gaulle au pouvoir:
la « une » de L'Echo d'Alger, le 14 mai 1958
Une crise très largement médiatisée
Les hésitations et les revirements des médias audiovisuels
Les actualités cinématographiques du 21 mai 1958
voir un extrait
Les actualités cinématographiques du 4 juin 1958
voir un extrait
Une crise très largement médiatisée
Les hésitations et les revirements des médias audiovisuels
Le journal télévisé du 14 mai 1958
voir un long extrait
a) Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Une presse quotidienne « épurée » et renouvelée après la guerre
Le renouvellement et le déclin de la presse après la Libération
Le début d'un inexorable déclin de la presse quotidienne
b) L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Les années 1950-1960: l’âge d'or de la radio
L'un des premiers « transistors »
L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Les radios publiques, regroupées dans un organisme unique
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L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Un nouveau média: la télévision
Un média immédiatement contrôlé par l'État
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L’essor des médias audiovisuels dans les années 1950
Une diffusion qui s'accélère seulement dans les années 1960
c) La fin de la IVe République
La fin de la IVe République
d) Une crise très largement médiatisée
Une crise très largement médiatisée
Une presse algérienne très favorable au retour de De Gaulle au pouvoir:
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Une crise très largement médiatisée
Les hésitations et les revirements des médias audiovisuels
Les actualités cinématographiques du 21 mai 1958
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Les actualités cinématographiques du 4 juin 1958
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Une crise très largement médiatisée
Les hésitations et les revirements des médias audiovisuels
Le journal télévisé du 14 mai 1958
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3. Les médias audiovisuels au centre de la crise de mai 1968
a) Une grande partie des médias restent aux ordres du pouvoir après 1958. De Gaulle se méfie de la presse écrite, mais il fait de la radio et surtout de la télévision (62% des foyers en sont équipés en 1968, contre 16% en 1962) des instruments privilégiés de son gouvernement : c’est par ces médias qu’il met fin au putsch organisé en 1961 par une partie de l’armée et c’est par la télévision, où il intervient à 79 reprises entre 1958 et 1969, qu’il établit un lien direct avec les Français, l’un des fondements de la Ve République (document 1). Pour mieux contrôler l’audiovisuel public, regroupé à partir de 1963 à la « Maison de la Radio », l’Office de Radiodiffusion Télévision Français (l’ORTF) est créé en 1964 et est placé sous la tutelle du ministère de l’Information (document 2). Les radios périphériques échappent en revanche à cette emprise croissante du pouvoir politique sur les médias.
b) Mai 1968 est une crise aux dimensions multiples. Elle commence par une contestation née dans les universités parisiennes, dont les effectifs étudiants ont été multipliés par 5 depuis 1945 alors que peu de choses ont été prévues pour les accueillir (document 3): perturbée depuis le mois de mars par des manifestations, la faculté de Nanterre est fermée au début du mois de mai, ce qui amène ses étudiants à venir occuper la Sorbonne (document 4). Celle-ci ayant été à son tour fermée, des manifestations et des affrontements violents entre étudiants et CRS ont lieu tous les jours au Quartier latin à partir du 3 mai (document 5). Sur cette première crise, se greffe un profond malaise social lié à l’apparition du chômage et à la dégradation des conditions de travail de nombreux salariés. Pour faire aboutir leurs revendications, les syndicats déclenchent une grève générale : il y a 2 millions de grévistes le 13 mai, 10 millions le 22 mai (document 6). Mai 1968 est enfin une crise politique, alimentée par l’usure du pouvoir gaulliste et par ses hésitations face au mouvement étudiant: le 27 mai, l’opposition de gauche se joint au mouvement et réclame la démission de de Gaulle (document 7). La crise de 1968 touche particulièrement les médias, accusés de véhiculer la propagande du pouvoir : la parole des étudiants est surtout diffusée par des médias alternatifs, comme les journaux muraux, les affiches et surtout les graffitis (document 8).
c) Cette crise est la plus médiatisée de l’après-guerre. Pendant la première quinzaine de mai, les événements donnent lieu à des comptes-rendus détaillés et abondamment illustrés dans la presse (document 9), tandis que les radios et la télévision multiplient les reportages sur les mouvements étudiants et syndicaux. Mais la situation change à partir du 15 mai, lorsque les journaux touchés par la grève cessent de paraître et lorsque le gouvernement censure la diffusion de reportages trop favorables aux manifestants. En réaction, l’ORTF est progressivement paralysée par une grève de ses journalistes (document 10). Seules les radios périphériques assurent une couverture complète des événements et montrent la difficulté croissante pour le pouvoir de contrôler des médias de plus en plus nombreux (document 11).
d) La crise de 1968 est largement résolue par l’intermédiaire des médias. Après la signature le 27 mai des accords de Grenelle qui mettent fin aux mouvements de grève en donnant de très nombreux avantages aux salariés (document 12), de Gaulle met en scène une « disparition » très médiatisée : en étant introuvable pendant quelques heures le 29 mai, il fait sentir le poids de son absence aux Français (document 13). Le lendemain, il annonce à la radio qu’il reste au pouvoir, qu’il ne change pas de gouvernement et qu’il dissout l’Assemblée nationale (document 14). Cet acte d’autorité, accompagné le même jour d’une grande manifestation gaulliste sur les Champs-Elysées, met fin à la crise de 1968 : après les élections législatives de juin, de Gaulle obtient une majorité absolue à l’Assemblée (document 15).
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
Voici que la combinaison du micro et de l'écran s'offre à moi au moment même où l'innovation commence son foudroyant développement. Pour être présent partout, c'est là soudain un moyen sans égal. À condition toutefois que je réussisse dans mes apparitions.
A présent, les téléspectateurs regardent de Gaulle sur l'écran en l'entendant sur les ondes. Pour être fidèle à mon personnage, il me faut m'adresser à eux comme si c'était les yeux dans les yeux, sans papier et sans lunettes. Cependant, mes allocutions à la nation étant prononcées « ex cathedra » et destinées à toutes sortes d'analyses et d'exégèses, je les écris avec soin, quitte à fournir ensuite le grand effort nécessaire pour ne dire devant les caméras que ce que j'ai d'avance préparé. Pour ce septuagénaire, assis seul derrière une table sous d'implacables lumières, il s'agit qu'il paraisse assez animé et spontané pour saisir et retenir l'attention, sans se commettre en gestes excessifs et en mimiques déplacées.
Maintes fois en ces quatre ans, les Français, par millions et par millions, rencontrent ainsi le général de Gaulle.
Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir, 1970
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
De Gaulle, expert en communication
voir la conférence de presse du 19 mai 1958
De Gaulle face au « putsch des généraux »
voir l'allocution télévisée du 23 avril 1961
Caricature de Jean Effel publiée dans
L'Express du 30 janvier 1964
Le discours de de Gaulle écouté à la radio
par les soldats de l'armée d'Algérie
De Gaulle, « président de télévision »
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
De Gaulle à la télévision et à la radio:
76 interventions entre 1958 et 1969
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
De Gaulle devant la maquette de la « Maison de la Radio »
L'ORTF, l'organisme de tutelle de l'audiovisuel public
L'information télévisée sous le contrôle du pouvoir:
voir le JT du 20 avril 1963
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Un nombre d'étudiants qui explose ...
... et des universités peu équipées pour y faire face
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Une contestation étudiante qui commence à l'université de Nanterre:
Le « mouvement du 22 mars », dirigé par Daniel Cohn-Bendit (au premier plan)
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Les premières manifestations suivies d'affrontements avec la police, le 3 mai
Voir en vidéo un compte-rendu de cette journée
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Une paralysie totale du pays:
10 millions de grévistes dans la deuxième quinzaine de mai 1968
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Une crise politique, alimentée par l'usure du pouvoir de de Gaulle
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Une crise politique, alimentée par les hésitations du gouvernement
Le discours de Pompidou à l'Assemblée, le 14 mai,
voir un extrait de ce discours
L'intervention de de Gaulle, le 24 mai
voir un extrait de cette intervention
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Le meeting de l'opposition au stade Charlety, le 27 mai 1968
voir un reportage (muet) sur cette manifestation
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Une méfiance générale envers les médias: quatre affiches de 1968
Mai 1968: une crise aux dimensions multiples
Mai 68, un choc de générations: l'un des chefs-d'œuvre du photographe Henri Cartier-Bresson
Une crise fortement relayée par les médias
Une crise fortement relayée par les médias
Je ne peux pas ne pas souligner le rôle, en pareil cas difficilement évitable mais néfaste, de radios qui, sous prétexte d'informer, enflammaient, quand elles ne provoquaient pas. Entre la diffusion des renseignements et la complicité, entre le souci de recueillir les explications des manifestants et l’appel à la manifestation, il n'y a qu'un pas et qui fut franchi parfois allègrement.
Georges Pompidou, déclaration à l'Assemblée nationale, le 14 mai 1968
Une crise fortement relayée par les médias
La grève de l'audiovisuel public, à partir du 17 mai 1968
Une crise fortement relayée par les médias
Depuis le 6 mai, le transistor est devenu le cordon ombilical qui relie la France à sa révolution. La télévision, muselée ou presque, a pour l'instant renversé le régime de l'image. Le pouvoir est à la parole. Et dans le domaine de l'information, les radios périphériques, grâce à leur souplesse, à leur mobilité, grâce aussi à une certaine liberté, ont affirmé leur puissance et, dans l'ensemble, assumé leurs responsabilités.
Danièle Heyman, L'Express, 3 juin 1968
Une crise fortement relayée par les médias
Des radios au plus près des manifestants
voir un reportage rétrospectif sur les radios périphériques en 1968
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
La signature des accords de Grenelle, le 27 mai 1968:
le secrétaire général de la CGT, Georges Séguy, au premier plan;
Pompidou et Jacques Chirac, son conseiller, au second plan
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
La disparition de de Gaulle, le 29 mai 1968:
écouter un extrait du journal de 20 heures de France Inter ce jour-là
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
Le discours décisif de de Gaulle à la radio, le 30 mai 1968:
écouter cette allocution
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
La fin de la crise de mai 68: la manifestation gaulliste sur les Champs-Elysées, le 30 mai ...
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
... et le triomphe du parti gaulliste aux élections législatives de juin 1968
a) Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
Voici que la combinaison du micro et de l'écran s'offre à moi au moment même où l'innovation commence son foudroyant développement. Pour être présent partout, c'est là soudain un moyen sans égal. À condition toutefois que je réussisse dans mes apparitions.
A présent, les téléspectateurs regardent de Gaulle sur l'écran en l'entendant sur les ondes. Pour être fidèle à mon personnage, il me faut m'adresser à eux comme si c'était les yeux dans les yeux, sans papier et sans lunettes. Cependant, mes allocutions à la nation étant prononcées « ex cathedra » et destinées à toutes sortes d'analyses et d'exégèses, je les écris avec soin, quitte à fournir ensuite le grand effort nécessaire pour ne dire devant les caméras que ce que j'ai d'avance préparé. Pour ce septuagénaire, assis seul derrière une table sous d'implacables lumières, il s'agit qu'il paraisse assez animé et spontané pour saisir et retenir l'attention, sans se commettre en gestes excessifs et en mimiques déplacées.
Maintes fois en ces quatre ans, les Français, par millions et par millions, rencontrent ainsi le général de Gaulle.
Charles de Gaulle, Mémoires d’espoir, 1970
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
De Gaulle, expert en communication
voir la conférence de presse du 19 mai 1958
De Gaulle face au « putsch des généraux »
voir l'allocution télévisée du 23 avril 1961
Caricature de Jean Effel publiée dans
L'Express du 30 janvier 1964
Le discours de de Gaulle écouté à la radio
par les soldats de l'armée d'Algérie
De Gaulle, "président de télévision"
Des médias audiovisuels au service du pouvoir après 1958
De Gaulle devant la maquette de la « Maison de la Radio »
L'ORTF, l'organisme de tutelle de l'audiovisuel public
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... et des universités peu équipées pour y faire face
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Les premières manifestations suivies d'affrontements avec la police, le 3 mai
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c) Une crise fortement relayée par les médias
Une crise fortement relayée par les médias
Une crise fortement relayée par les médias
Je ne peux pas ne pas souligner le rôle, en pareil cas difficilement évitable mais néfaste, de radios qui, sous prétexte d'informer, enflammaient, quand elles ne provoquaient pas. Entre la diffusion des renseignements et la complicité, entre le souci de recueillir les explications des manifestants et l’appel à la manifestation, il n'y a qu'un pas et qui fut franchi parfois allègrement.
Georges Pompidou, déclaration à l'Assemblée nationale, le 14 mai 1968
Une crise fortement relayée par les médias
Depuis le 6 mai, le transistor est devenu le cordon ombilical qui relie la France à sa révolution. La télévision, muselée ou presque, a pour l'instant renversé le régime de l'image. Le pouvoir est à la parole. Et dans le domaine de l'information, les radios périphériques, grâce à leur souplesse, à leur mobilité, grâce aussi à une certaine liberté, ont affirmé leur puissance et, dans l'ensemble, assumé leurs responsabilités.
Danièle Heyman, L'Express, 3 juin 1968
Une crise fortement relayée par les médias
Des radios au plus près des manifestants
voir un reportage rétrospectif sur les radios périphériques en 1968
d) Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
La signature des accords de Grenelle, le 27 mai 1968:
le secrétaire général de la CGT, Georges Séguy, au premier plan;
Pompidou et Jacques Chirac, son conseiller, au second plan
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
La disparition de de Gaulle, le 29 mai 1968:
écouter un extrait du journal de 20 heures de France Inter ce jour-là
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
Le discours décisif de de Gaulle à la radio, le 30 mai 1968:
écouter cette allocution
Une crise en grande partie résolue par l’intermédiaire des médias
... et le triomphe du parti gaulliste aux élections législatives de juin 1968
Epilogue: Les médias et l’opinion publique depuis 1968
1. La libéralisation et le renouvellement des médias après 1968. C’est avec les années 1970 et 1980 que le paysage médiatique commence à prendre ses contours actuels : alors que la presse écrite poursuit un inexorable déclin, les médias audiovisuels s’affranchissent de la tutelle du pouvoir politique. En 1974, la disparition de l’ORTF permet la création de trois chaines de télévision très largement autonomes, même si elles sont encore financées par l’impôt. A la fin des années 1970, des « radios libres » commencent à émettre illégalement sur la bande FM ; en 1982 une loi met fin au monopole de diffusion exercé par l’État et les radios privées se multiplient : il y en a plus de 1 600 en 1984. Les années 1980 voient enfin apparaître les premières chaines de télévision privées : Canal+ en 1984, la 5 et TV6 (aujourd’hui disparues) en 1985 ; pendant les années 1990 et 2000, l’offre télévisuelle n’en finit plus d’augmenter, grâce au câble, au satellite ou à la Télévision Numérique Terrestre. Cette évolution s’achève dans les années 1990 avec la généralisation d’Internet, qui permet une création démultipliée et sans cesse accélérée de nouveaux médias : sites d’information, blogs, réseaux sociaux, etc.
2. Une médiatisation croissante de la vie politique. En même temps qu’ils s’affranchissent du pouvoir, les médias deviennent les éléments essentiels de la communication politique. Comme le montre l’institution en 1974 d’un débat télévisé opposant les candidats au deuxième tour de l’élection présidentielle, la partie la plus visible, sinon la plus importante, de la vie politique a lieu aujourd’hui à la télévision (où le nombre des émissions politiques accroît en proportion de l’augmentation du nombre des chaines), sur Internet ou sur les réseaux sociaux. Parallèlement, la plupart des médias deviennent de plus en plus critiques vis-à-vis du pouvoir politique.
3. Une opinion publique de plus en plus défiante. Les sondages toujours plus nombreux qui prennent la mesure de l’opinion font apparaître une désaffection croissante vis-à-vis des hommes et des institutions politiques, mais aussi vis-à-vis d’un grand nombre de médias soupçonnés de complaisance à l’égard de ces derniers. Cette défiance se traduit aussi bien par une hausse régulière de l’abstention aux élections que par la place croissante des votes protestataires, comme le montrent les premiers tours des élections présidentielles de 2002 et de 2017. S’il n’y a plus eu de crise politique majeure en France depuis 1968, il y a une crise rampante du politique dans l’opinion, dont les médias sont à la fois les responsables et les victimes. C’est l’une des choses que montre le plus le mouvement actuel des « gilets jaunes ».