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Leçon n°2 - Gouverner la France depuis 1946 :
État, gouvernement et administration. Héritages et évolution
(cliquez sur les titres des parties et des paragraphes pour faire apparaître le texte et les documents de la leçon)
Un État est une construction permanente qui assure la direction politique d’une nation ; un gouvernement est, au sens le plus large, l’ensemble des personnes qui exercent les pouvoirs de l’État, tandis que l’administration est l’ensemble des services et des personnes au service de l’État. En France, ce dernier est le résultat de multiples héritages accumulés depuis le Moyen-Âge, mais aussi d’évolutions récentes, engagées aux lendemains de la seconde Guerre mondiale.
Comment l’organisation, le rôle et les moyens de l’État ont-ils évolué depuis la naissance de la IVe République ? Pour quelles raisons et dans quelles circonstances ces évolutions ont-elles eu lieu ?
I. L’organisation et le rôle de l’État de 1946 à la fin des années 1960
1. D’un régime parlementaire à un régime présidentiel (1946-1969)
a) Etablie en 1946, la IVe République est un régime parlementaire. À la Libération, une Constitution doit être rédigée, afin de rétablir les institutions républicaines disparues en 1940. Contre l’avis de de Gaulle, qui souhaite un pouvoir exécutif fort, la IVe République proclamée en octobre 1946 donne la primauté au pouvoir législatif : non seulement l’Assemblée nationale et le Conseil de la République (l’ancêtre du Sénat) élisent le président de la République, mais c’est l’Assemblée qui donne au gouvernement l’investiture, c’est-à-dire l’autorisation de gouverner (document 1). Ces institutions, ajoutées au morcellement des majorités parlementaires et à l’opposition conjointe des gaullistes et des communistes, font de la IVe République un régime instable : le régime connaît vingt-trois gouvernements en 12 ans et son impuissance à régler le problème algérien précipite sa chute en 1958 (document 2).
b) La Ve République est au contraire un régime semi-présidentiel. Adoptée en septembre 1958, la Constitution voulue par de Gaulle renforce le rôle de l’exécutif. Elu par 40 000 grands électeurs et doté de très larges pouvoirs, le président de la République peut dissoudre l’Assemblée et consulter directement la nation par référendum. Le gouvernement, nommé par le président, n’a plus besoin d’être investi pour gouverner. Si l’Assemblée nationale et le Sénat votent les lois, les députés ne peuvent renverser celui-ci qu’en adoptant une motion de censure à la majorité absolue (document 3). Le caractère présidentiel du régime est encore accentué après 1958 par le style de gouvernement de de Gaulle : les interventions télévisées, les voyages en province et les référendums (sur l’Algérie, notamment) renforcent le lien direct qu’il établit avec les Français (document 4). Aboutissement de ces pratiques, la réforme constitutionnelle de 1962 permet l’élection du président de la République au suffrage universel direct (document 5).
La IVe République, un régime parlementaire (1946-1958)
L'instabilité ministérielle de la IVe République: 23 gouvernements en 12 ans
La IVe République, un régime parlementaire (1946-1958)
Un régime qui ne résiste pas à l'insurrection des Français d'Algérie en 1958
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Un changement de Constitution
massivement approuvé par les Français
La Ve République, un régime semi-présidentiel
La Constitution adoptée en septembre 1958
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Des pouvoirs présidentiels renforcés par le lien direct que de Gaulle établit avec les Français
De Gaulle en visite à Reims en 1963
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Des pouvoirs présidentiels renforcés par le lien direct que de Gaulle établit avec les Français
De Gaulle à la télévision en 1958
« Mais c’est au peuple lui-même, et non seulement à ses cadres, que je veux être lié par les yeux et les oreilles. Il faut que les Français me voient et m’entendent, que je les entende et les voie. La télévision et les voyages publics m’en donnent la possibilité. »
Charles De Gaulle, Mémoires d’espoir, 1970
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Une affiche en faveur du « oui » au référendum d'octobre 1962
La Ve République, un régime semi-présidentiel
La Constitution modifiée en octobre 1962
a) La IVe République, un régime parlementaire (1946-1958)
La IVe République, un régime parlementaire (1946-1958)
Un régime qui ne résiste pas à l'insurrection des Français d'Algérie en 1958
b) La Ve République, un régime semi-présidentiel
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Un changement de Constitution
massivement approuvé par les Français
La Ve République, un régime semi-présidentiel
Des pouvoirs présidentiels renforcés par le lien direct que de Gaulle établit avec les Français
De Gaulle à la télévision en 1958
« Mais c’est au peuple lui-même, et non seulement à ses cadres, que je veux être lié par les yeux et les oreilles. Il faut que les Français me voient et m’entendent, que je les entende et les voie. La télévision et les voyages publics m’en donnent la possibilité. »
Charles De Gaulle, Mémoires d’espoir, 1970
2. Un État centralisé et efficace
a) L’administration est renforcée après la fin de la 2nde Guerre mondiale. Créée en 1945, l’École Nationale d’Administration forme des hauts fonctionnaires qui assurent une forte continuité de l’action de l’État malgré l’instabilité des gouvernements de la IVe République (document 1). Sous la Ve République, l’ENA conserve ce rôle, mais elle fournit aussi une part croissante du personnel politique. Par ailleurs, un statut de la fonction publique mis en place en 1946 garantit aux fonctionnaires, dont le recrutement se fait par concours et dont l’avancement est contrôlé par les syndicats, une indépendance complète face aux pouvoirs politiques ou économiques (document 2). Enfin, l’INSEE, l’Institut de la Statistique et des Études Économiques, est créé en 1946 pour donner à l’État les connaissances nécessaires à son action (document 3).
b) La centralisation de l’État reste le principal outil du gouvernement. Héritée de l’État monarchique et renforcée par la Révolution (qui crée les départements en 1789) et par Napoléon (qui institue les préfets en 1801) (document 4), la concentration des pouvoirs de décision entre les mains du gouvernement central est maintenue pendant toute la IVe République et au début de la Ve République : dans chaque département et dans chaque région (elles sont créées en 1963), les préfets assurent l’application des décisions du gouvernement et dirigent les services de l’État (document 5). Moqué par de nombreuses caricatures, le gouvernement centralisé du début de la Ve République est assimilé à une « République monarchique » (document 6).
La formation d’une puissante administration
La création de l'ENA
II est créé une École nationale d'administration chargée de la formation des fonctionnaires qui se destinent au Conseil d'État, à la Cour des comptes, aux carrières diplomatiques ou préfectorales, à l'Inspection générale des finances, au corps des administrateurs civils, ainsi qu'à certains autres corps ou services déterminés par décret pris après avis du Conseil d'État et contresigné du ministre intéressé et du ministre de l'Économie et des Finances. Les femmes ont accès à l'École nationale d'administration, sous réserve des règles spéciales d'admission à certains emplois.
Article 5 de l'ordonnance du 9 octobre 1945
La première promotion de l’ENA « France combattante », 1946-1947
La formation d’une puissante administration
Le statut des fonctionnaires
1. Le Statut prévoit la participation étroite des syndicats de fonctionnaires à la gestion du personnel et aux questions d'organisation et de technique [...].
2. Le Statut pose en matière de recrutement, et surtout en matière d'avancement et de discipline, des principes relativement nouveaux. [...] Le dossier du fonctionnaire ne doit contenir aucune indication se rapportant à ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses. [...]
5. Le Statut proclame l'égalité des sexes ; l'accès des services publics est ouvert désormais aux femmes dans les mêmes conditions que pour les hommes.
6. Le Statut apporte aux fonctionnaires les garanties positives de traitement et de retraite, les garanties de carrière qui auront pour effet de restituer tout son prestige à la fonction publique. Le traitement de début du fonctionnaire sera fixé à 120 % du minimum vital. La pension d'ancienneté ne pourra en aucun cas être inférieure à ce minimum vital.
Maurice Thorez, ministre de la Fonction publique,
commentaire portant sur la loi du 19 octobre 1946
La formation d’une puissante administration
La centralisation, principal outil du gouvernement
Le gouvernement centralisé, un héritage de l'État monarchique
L'ordonnance de Villers-Cotterêts (1539),
qui impose l'usage du français dans tous les documents administratifs
La centralisation, principal outil du gouvernement
Le préfet de la Marne accueillant Eisenhower à Reims en 1945
La centralisation, principal outil du gouvernement
Le préfet de la Marne accueillant de Gaulle à Reims en 1963
a) La formation d’une puissante administration
La formation d’une puissante administration
La création de l'ENA
II est créé une École nationale d'administration chargée de la formation des fonctionnaires qui se destinent au Conseil d'État, à la Cour des comptes, aux carrières diplomatiques ou préfectorales, à l'Inspection générale des finances, au corps des administrateurs civils, ainsi qu'à certains autres corps ou services déterminés par décret pris après avis du Conseil d'État et contresigné du ministre intéressé et du ministre de l'Économie et des Finances. Les femmes ont accès à l'École nationale d'administration, sous réserve des règles spéciales d'admission à certains emplois.
Article 5 de l'ordonnance du 9 octobre 1945
La première promotion de l’ENA « France combattante », 1946-1947
La formation d’une puissante administration
Le statut des fonctionnaires
1. Le Statut prévoit la participation étroite des syndicats de fonctionnaires à la gestion du personnel et aux questions d'organisation et de technique [...].
2. Le Statut pose en matière de recrutement, et surtout en matière d'avancement et de discipline, des principes relativement nouveaux. [...] Le dossier du fonctionnaire ne doit contenir aucune indication se rapportant à ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses. [...]
5. Le Statut proclame l'égalité des sexes ; l'accès des services publics est ouvert désormais aux femmes dans les mêmes conditions que pour les hommes.
6. Le Statut apporte aux fonctionnaires les garanties positives de traitement et de retraite, les garanties de carrière qui auront pour effet de restituer tout son prestige à la fonction publique. Le traitement de début du fonctionnaire sera fixé à 120 % du minimum vital. La pension d'ancienneté ne pourra en aucun cas être inférieure à ce minimum vital.
Maurice Thorez, ministre de la Fonction publique,
commentaire portant sur la loi du 19 octobre 1946
La formation d’une puissante administration
b) La centralisation, principal outil du gouvernement
La centralisation, principal outil du gouvernement
Le gouvernement centralisé, un héritage de l'État monarchique
L'ordonnance de Villers-Cotterêts (1539),
qui impose l'usage du français dans tous les documents administratifs
3. Un État interventionniste dans de nombreux domaines
a) Un « État-Providence » est mis en place après 1945. Inscrit dans le programme du Conseil National de la Résistance en 1943, ce nouveau rôle de l’État, inspiré des théories de l’économiste J.M. Keynes, voit le jour après la Libération : la Constitution de la IVe République garantit de nombreux droits économiques et sociaux (document 1), tandis que la Sécurité sociale financée par les employeurs et les salariés est créée en 1945 : en même temps qu’ils reçoivent des allocations familiales pour subvenir aux besoins de leurs enfants, les Français bénéficient d’une assurance contre la maladie, la vieillesse et les accidents du travail (document 2). Un salaire minimum est par ailleurs mis en place en 1950. En redistribuant ainsi les richesses du pays, l’État augmente le niveau de vie et soutient la croissance économique.
b) L’État devient également planificateur, entrepreneur et aménageur. Pour coordonner la reconstruction du pays, de Gaulle met en place en 1946 un Commissariat général au Plan qui oriente, sans contrainte, le développement de l’économie française (document 3). Par les nationalisations de 1944-1946, l’État prend aussi le contrôle des secteurs de l’énergie, des transports, des banques et des assurances. La France se dote ainsi d’une économie mixte, où un puissant service public coexiste à côté du secteur privé (document 4). Enfin, la DATAR (Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale) est créée en 1963 pour corriger les déséquilibres du territoire français : les villes nouvelles de la région parisienne (Marne-la-Vallée ou Cergy-Pontoise), les zones industrialo-portuaires de Fos-sur-Mer et Dunkerque ou les stations balnéaires du Languedoc-Roussillon illustrent ce nouveau rôle de l’État, qui multiplie aussi les projets dans les secteurs innovants, comme le nucléaire, l’informatique ou les transports rapides (le programme qui donne naissance au Concorde est lancé en 1962) (document 5).
c) Une politique culturelle inédite est mise en place par la Ve République. Un ministère de la Culture créé en 1959 est confié à André Malraux, pour faciliter l’accès à la culture et pour encourager la création artistique. En même temps que des Maisons de la culture sont créées dans plusieurs villes de province, des financements publics soutiennent l’action de nombreux théâtres, musées et festivals (document 6). Chaque président de la Ve République tient par ailleurs à associer son nom à une grande réalisation culturelle à Paris : Georges Pompidou et le centre Beaubourg, Valéry Giscard d’Estaing et le musée d’Orsay, François Mitterrand et la Bibliothèque Nationale de France, Jacques Chirac et le Musée des Arts premiers (document 7).
La mise en place d’un « État-Providence »
De nouveaux droits économiques et sociaux
La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.
Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence.
La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales.
Extraits du Préambule de la Constitution de la IVe République, 1946.
La mise en place d’un « État-Providence »
Il est institué une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs à leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent.
L’organisation de la Sécurité sociale assure dès à présent le service des prestations prévues par les législations concernant les assurances sociales, l'allocation aux vieux travailleurs salariés, les accidents du travail et maladies professionnelles et les allocations familiales et de salaire unique aux catégories de travailleurs protégés par chacune de ses législations dans le cadre des prescriptions fixées par celle-ci et sous réserve des dispositions de la présente ordonnance.
Ordonnance du 4 octobre 1945
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
A partir de 1945, la reconstruction du pays est organisée par l'État
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Jean Monnet, Commissaire Général
au Plan de 1946 à 1952
La planification à la française
La politique des investissements suivis depuis la Libération a été l'élément essentiel de notre redressement économique. Il en sera nécessairement de même dans l'avenir. Notre production est encore loin en effet d'avoir atteint un niveau satisfaisant [...].
Or l'accroissement de la production est commandé comme dans le passé par l'augmentation des ressources de base. Le défaut de charbon, d'acier est bien connu. Il suffirait que la production industrielle augmente de quelques points pour que notre approvisionnement en énergie électrique cesse d'être assuré. [...] Il faut donc assurer aux investissements dans ces secteurs [des ressources de base] un financement régulier et inconditionnel. Ceci ne nécessite d'ailleurs pas le recours à l'impôt pour 1952. 400 milliards d'emprunts sont prévus dans le budget de 1952 (en dehors des 85 milliards d'emprunts directs des sociétés nationales).
Note de Jean Monnet, 8 mars 1952
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Les principales nationalisations de l'après-guerre
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Un fort soutien aux secteurs innovants
De Gaulle inaugurant l’usine de gaz de Lacq
(Pyrénées-Atlantiques) en 1959
Le 1er vol du Concorde en 1971
Le « Plan Calcul », lancé en 1967
Une politique culturelle inédite
Les missions du ministère de la Culture
Le ministère chargé des affaires culturelles a pour mission de rendre accessible les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de français ; d’assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel, et de favoriser la création d’offre de l’art et de l’esprit qu’il enrichissent.
Décret portant organisation du ministère chargé des affaires culturelles, 24 juillet 1959
Le ministère chargé de la culture a pour mission : de permettre à tous les français de cultiver leur capacité d’inventer et de créer, d’exprimer librement leur talent et de recevoir la formation artistique de leur choix; de préserver le patrimoine culturel national, régional ou des divers groupes sociaux pour le profit commun de la collectivité tout entière ; de favoriser la création d’œuvres d’art et de l’esprit et de leur donner la plus vaste audience; de contribuer au rayonnement de la culture et de l’art français dans le libre dialogue des cultures du monde.
Décret relatif à l’organisation du ministère de la Culture, 10 mai 1982
a) La mise en place d’un « État-Providence »
La mise en place d’un « État-Providence »
De nouveaux droits économiques et sociaux
La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.
Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence.
La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales.
Extraits du Préambule de la Constitution de la IVe République, 1946.
La mise en place d’un « État-Providence »
Il est institué une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs à leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent.
L’organisation de la Sécurité sociale assure dès à présent le service des prestations prévues par les législations concernant les assurances sociales, l'allocation aux vieux travailleurs salariés, les accidents du travail et maladies professionnelles et les allocations familiales et de salaire unique aux catégories de travailleurs protégés par chacune de ses législations dans le cadre des prescriptions fixées par celle-ci et sous réserve des dispositions de la présente ordonnance.
Ordonnance du 4 octobre 1945
b) Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
A partir de 1945, la reconstruction du pays est organisée par l'État
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Jean Monnet, Commissaire Général
au Plan de 1946 à 1952
La planification à la française
La politique des investissements suivis depuis la Libération a été l'élément essentiel de notre redressement économique. Il en sera nécessairement de même dans l'avenir. Notre production est encore loin en effet d'avoir atteint un niveau satisfaisant [...].
Or l'accroissement de la production est commandé comme dans le passé par l'augmentation des ressources de base. Le défaut de charbon, d'acier est bien connu. Il suffirait que la production industrielle augmente de quelques points pour que notre approvisionnement en énergie électrique cesse d'être assuré. [...] Il faut donc assurer aux investissements dans ces secteurs [des ressources de base] un financement régulier et inconditionnel. Ceci ne nécessite d'ailleurs pas le recours à l'impôt pour 1952. 400 milliards d'emprunts sont prévus dans le budget de 1952 (en dehors des 85 milliards d'emprunts directs des sociétés nationales).
Note de Jean Monnet, 8 mars 1952
Un État entrepreneur, planificateur et aménageur
Un fort soutien aux secteurs innovants
De Gaulle inaugurant l’usine de gaz de Lacq
(Pyrénées-Atlantiques) en 1959
Le 1er vol du Concorde en 1971
Le « Plan Calcul », lancé en 1967
c) Une politique culturelle inédite
Une politique culturelle inédite
Les missions du ministère de la Culture
Le ministère chargé des affaires culturelles a pour mission de rendre accessible les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de français ; d’assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel, et de favoriser la création d’offre de l’art et de l’esprit qu’il enrichissent.
Décret portant organisation du ministère chargé des affaires culturelles, 24 juillet 1959
Le ministère chargé de la culture a pour mission : de permettre à tous les français de cultiver leur capacité d’inventer et de créer, d’exprimer librement leur talent et de recevoir la formation artistique de leur choix; de préserver le patrimoine culturel national, régional ou des divers groupes sociaux pour le profit commun de la collectivité tout entière ; de favoriser la création d’œuvres d’art et de l’esprit et de leur donner la plus vaste audience; de contribuer au rayonnement de la culture et de l’art français dans le libre dialogue des cultures du monde.
Décret relatif à l’organisation du ministère de la Culture, 10 mai 1982
II. Les transformations du rôle de l’État de la fin des années 1960 aux années 1990
1. Mai 1968 et ses conséquences
a) Cette crise impose à l’État de s’adapter aux évolutions de la société française. Si de Gaulle parvient à résoudre la crise de 1968 en accordant de larges augmentations de salaires et en prononçant la dissolution de l’Assemblée, il doit quitter le pouvoir en 1969 après l’échec d’un référendum qu’il avait organisé pour restaurer sa légitimité (document 1). Les méthodes gaulliennes de gouvernement, rigides et autoritaires, n’étant plus adaptées à la société française, ses successeurs Pompidou et Giscard d’Estaing tentent de se montrer plus proches des Français et de leurs attentes (document 2). Chaban-Delmas, premier ministre de 1969 à 1972, élabore aussi un programme de « Nouvelle Société », destiné à réduire la place de l’État en donnant plus d’initiative aux collectivités locales, aux partenaires sociaux et aux entreprises privées (document 3).
b) De nombreuses réformes destinées à libéraliser la société française sont mises en place à la suite de mai 1968. En 1974, la majorité est abaissée de 21 à 18 ans pour donner à la jeunesse plus de possibilités d’expression (document 4) ; l’année suivante, le divorce par consentement mutuel est instauré et Simone Veil fait voter la loi légalisant l’avortement, afin que toutes les femmes aient la possibilité de mettre fin à une grossesse non désirée (document 5); en 1975 toujours, l’accès au « collège unique » est donné à tous les enfants par le vote de la loi Haby ; enfin, l’ORTF disparaît, afin de rendre plus autonomes les chaines de la télévision publique (document 6).
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
La démission de de Gaulle, le 27 avril 1969
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
Une « République monarchique » maintenue malgré des inflexions mineures
Georges Pompidou (1969-1974)
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
Une « République monarchique » maintenue malgré des inflexions mineures
Valéry Giscard d'Estaing (1974-1981)
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
Tentaculaire et en même temps inefficace : voilà, nous le savons tous, ce qu’est en passe de devenir l’État, et cela en dépit de l’existence d’un corps de fonctionnaires, très généralement compétents parfois remarquables. Tentaculaire, car, par l’extension indéfinie de ses responsabilités, il a peu à peu mis en tutelle la société française tout entière. Cette évolution ne ce serait point produite si, dans ses profondeurs, notre société ne l’avait réclamée. Or c’est bien ce qui s’est passé. Le renouveau de la France après la Libération, s’il à mobilisé les énergies, a aussi consolidé une vieille tradition colbertiste et jacobine, faisant de l’État une nouvelle providence. Il n’est presque aucune profession, il n’est aucune catégorie sociale qui n’ait, depuis 25 ans, réclamé ou exigé de lui protection, subventions, détaxation ou réglementation. Mais, si l’État ainsi sollicité a constamment étendu son emprise, son efficacité ne s’est pas accrue car souvent les modalités de ces interventions ne lui permettent pas d’atteindre ses buts. Est-il besoin de citer des exemples ?
Nos collectivités locales étouffent sous le poids de la tutelle. Nos entreprises publiques, passées sous la coupe des bureaux des ministères, ont perdu la maîtrise de leurs décisions essentielles : investissements, prix, salaires. Les entreprises privées elles-mêmes sont accablées par une réglementation proliférante.
Jacques Chaban-Delmas, discours à l’Assemblée, le 16 septembre 1969
Une nouvelle législation plus libérale
La « une » de Charlie Hebdo du 1erseptembre 1974
Il me paraît juste d'adapter la législation à l'évolution des mœurs et des esprits et d'assurer une meilleure répartition des droits, des devoirs et des responsabilités entre les français en âge de les exercer. S'il m'est permis d'exprimer ma conviction en la matière, j'ajouterai que la volonté de changement et de réforme, qui anime l'action du gouvernement, implique un acte de confiance dans la jeunesse de notre pays. Laisser, pour ainsi dire, en marge de la nation les aspirations de la jeunesse, c'est la contenir dans l'irresponsabilité ou l'abandonner à la contestation. Lui permettre, au contraire, d'accéder à la majorité politique, c'est lui offrir la chance d'un engagement positif. L'esprit de la présente loi est d'instituer, au service de la jeunesse, ce que j'appellerai une pédagogie de la responsabilité démocratique. Répondre à l'attente de la jeunesse, c'est aussi donner tout son élan à notre politique de transformation de la société.
Jean Lecanuet, ministre de la Justice,
discours à l'Assemblée nationale le 25 juin 1974
Une nouvelle législation plus libérale
Avec la réforme de l'audiovisuel public de 1975,
un organisme centralisé et contrôlé par l'État
laisse la place à trois chaines publiques largement autonomes
a) La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
La démission de de Gaulle, le 27 avril 1969
La nécessaire adaptation de l’État aux évolutions de la société française
Tentaculaire et en même temps inefficace : voilà, nous le savons tous, ce qu’est en passe de devenir l’État, et cela en dépit de l’existence d’un corps de fonctionnaires, très généralement compétents parfois remarquables. Tentaculaire, car, par l’extension indéfinie de ses responsabilités, il a peu à peu mis en tutelle la société française tout entière. Cette évolution ne ce serait point produite si, dans ses profondeurs, notre société ne l’avait réclamée. Or c’est bien ce qui s’est passé. Le renouveau de la France après la Libération, s’il à mobilisé les énergies, a aussi consolidé une vieille tradition colbertiste et jacobine, faisant de l’État une nouvelle providence. Il n’est presque aucune profession, il n’est aucune catégorie sociale qui n’ait, depuis 25 ans, réclamé ou exigé de lui protection, subventions, détaxation ou réglementation. Mais, si l’État ainsi sollicité a constamment étendu son emprise, son efficacité ne s’est pas accrue car souvent les modalités de ces interventions ne lui permettent pas d’atteindre ses buts. Est-il besoin de citer des exemples ?
Nos collectivités locales étouffent sous le poids de la tutelle. Nos entreprises publiques, passées sous la coupe des bureaux des ministères, ont perdu la maîtrise de leurs décisions essentielles : investissements, prix, salaires. Les entreprises privées elles-mêmes sont accablées par une réglementation proliférante.
Jacques Chaban-Delmas, discours à l’Assemblée, le 16 septembre 1969
b) Une nouvelle législation plus libérale
Une nouvelle législation plus libérale
La « une » de Charlie Hebdo du 1erseptembre 1974
Il me paraît juste d'adapter la législation à l'évolution des mœurs et des esprits et d'assurer une meilleure répartition des droits, des devoirs et des responsabilités entre les français en âge de les exercer. S'il m'est permis d'exprimer ma conviction en la matière, j'ajouterai que la volonté de changement et de réforme, qui anime l'action du gouvernement, implique un acte de confiance dans la jeunesse de notre pays. Laisser, pour ainsi dire, en marge de la nation les aspirations de la jeunesse, c'est la contenir dans l'irresponsabilité ou l'abandonner à la contestation. Lui permettre, au contraire, d'accéder à la majorité politique, c'est lui offrir la chance d'un engagement positif. L'esprit de la présente loi est d'instituer, au service de la jeunesse, ce que j'appellerai une pédagogie de la responsabilité démocratique. Répondre à l'attente de la jeunesse, c'est aussi donner tout son élan à notre politique de transformation de la société.
Jean Lecanuet, ministre de la Justice,
discours à l'Assemblée nationale le 25 juin 1974
Une nouvelle législation plus libérale
Avec la réforme de l'audiovisuel public de 1975,
un organisme centralisé et contrôlé par l'État
laisse la place à trois chaines publiques largement autonomes
2. La redéfinition du rôle économique de l’État
a) Les gouvernements qui se succèdent entre 1974 et 1983 se montrent impuissants face au ralentissement de la croissance économique. Le gouvernement de Raymond Barre (1976-1981) tente de limiter le déficit budgétaire par une « politique de rigueur »: le soutien de l’Etat aux secteurs industriels les moins rentables est réduit tandis que les impôts et les cotisations sociales augmentent fortement (document 1). Au pouvoir à partir de 1981, la gauche tente à l’inverse d’accroître le rôle de l’État dans l’économie. De nombreuses entreprises industrielles sont nationalisées, le temps de travail est diminué, le SMIC, les allocations familiales et le minimum vieillesse sont augmentés afin de relancer la consommation (document 2). Mais cette politique volontariste est un échec dès 1983.
b) L’État se désengage de l’économie à partir de 1986. La droite revenue au pouvoir réalise de nombreuses privatisations jusqu’en 1993 : Renault, Air France, la Société Générale ou EDF-GDF quittent ainsi le secteur public (document 3). Les gouvernements qui se succèdent après 1986 procèdent aussi à une vaste dérèglementation de l’économie française : en suivant l’exemple donné par les Etats-Unis de Ronald Reagan et par le Royaume-Uni de Margaret Thatcher, le poids et les interventions de l’Etat sont réduits afin de donner plus de libertés aux entreprises privées (document 4). A droite comme à gauche, ce retour au libéralisme est justifié par l’accélération de la mondialisation et par les contraintes de la construction européenne .
L’échec des politiques de relance face à la crise
Raymond Barre (1976-1981) et les premières politiques de rigueur
Les prélèvements obligatoires
entre 1965 et 2010
L’échec des politiques de relance face à la crise
5. Des actions industrielles seront immédiatement lancées dans les secteurs de l'électronique, de l'énergie, des biens d'équipement, des transports et de l'automobile, de la chimie fine et de la bio-industrie, de la sidérurgie et de l'agroalimentaire afin de reconquérir le marché intérieur et de créer des emplois. [...]
16. Un programme de grands travaux publics, de construction de logement sociaux et d'équipements collectifs (crèches, restaurants scolaires, maisons de l'enfance) sera engagé dès le deuxième semestre de 1981. [...]
19. Le plan, démocratisé et décentralisé, donnera un contenu au développement économique. [...]
21. Le secteur public sera élargi par la nationalisation des neuf groupes industriels [...] de la sidérurgie et des activités de l'armement et de l'espace financée sur fonds publics. La nationalisation du crédit et des assurances sera achevée.
François Mitterrand, 110 propositions pour la France, 1981
L’échec des politiques de relance face à la crise
Un élargissement spectaulaire du secteur public pour relancer l'économie française
Le tournant libéral des années 1980
En quinze ans, entre globalisation financière, développement de la libre concurrence et évolutions du droit communautaire, l’ensemble constitué par les entreprises françaises sous contrôle public a été considérablement remodelé. La mutation s’est avant tout traduite par une forte contraction. Fin 1986, 3 500 entreprises; fin 2000, plus que 1 500). Les entreprises publiques occupent 1,1 million de salariés en 2000 contre 2,35 millions en 1986.
Deux grandes phases de privatisations sont à l’origine de cette évolution. La première s’ouvre avec la loi du 2 juillet 1986 qui prévoit le transfert au secteur privé de 28 groupes ou sous-groupes publics. Du fait de ce transfert, 1 200 entreprises, employant 350 000 salariés, sortent du secteur public.
La loi du 19 juillet 1993 inaugure la deuxième phase de privatisations. Elle élargit le champ des entreprises privatisables en ajoutant 13 groupes ou sous-groupes publics à la liste des sociétés de 1986 non encore privatisées Entre 1993 et 2000, le transfert au secteur privé a concerné 1 800 entreprises, qui occupaient au total 508 000 salariés au moment de leur transfert.
Au cours de cette phase apparaît une autre modalité de transfert : l’ouverture du capital. Entre 1993 et 2000, Renault, Bull, Thomson Multimédia, France Télécom et Air France ont ainsi été partiellement privatisées. Le transfert partiel des trois premières sociétés a été prolongé par une privatisation.
1985-2000: Quinze années de mutations du secteur public d’entreprises, Insee, 2002
Le tournant libéral des années 1980
Depuis des décennies – certains diront même des siècles –, la tentation française par excellence a été celle du dirigisme d’État. Qu’il s’agisse de l’économie ou de l’éducation, de la culture ou de la recherche, des technologies nouvelles ou de la défense de l’environnement, c’est toujours vers l’État que s’est tourné le citoyen pour demander idées et subsides. Peu à peu, s’est ainsi construite une société administrée, et même collectivisée, où le pouvoir s’est concentré dans les mains d’experts formés à la gestion des grandes organisations. Ce système de gouvernement, qui est en même temps un modèle social, n’est pas dénué de qualités : il flatte notre goût national pour l’égalité ; il assure pérennité et stabilité au corps social ; il se concilie parfaitement avec le besoin de sécurité qui s’incarne dans l’État-Providence.
Mais il présente deux défauts rédhibitoires : il se détruit lui-même, par obésité ; et surtout, il menace d’amoindrir les libertés individuelles. Les Français ont compris les dangers du dirigisme étatique et n’en veulent plus.
Jacques Chirac, discours devant l’Assemblée nationale, 9 avril 1986
a) L’échec des politiques de relance face à la crise
L’échec des politiques de relance face à la crise
Raymond Barre (1976-1981) et les premières politiques de rigueur
Les prélèvements obligatoires
entre 1965 et 2010
L’échec des politiques de relance face à la crise
5. Des actions industrielles seront immédiatement lancées dans les secteurs de l'électronique, de l'énergie, des biens d'équipement, des transports et de l'automobile, de la chimie fine et de la bio-industrie, de la sidérurgie et de l'agroalimentaire afin de reconquérir le marché intérieur et de créer des emplois. [...]
16. Un programme de grands travaux publics, de construction de logement sociaux et d'équipements collectifs (crèches, restaurants scolaires, maisons de l'enfance) sera engagé dès le deuxième semestre de 1981. [...]
19. Le plan, démocratisé et décentralisé, donnera un contenu au développement économique. [...]
21. Le secteur public sera élargi par la nationalisation des neuf groupes industriels [...] de la sidérurgie et des activités de l'armement et de l'espace financée sur fonds publics. La nationalisation du crédit et des assurances sera achevée.
François Mitterrand, 110 propositions pour la France, 1981
L’échec des politiques de relance face à la crise
Un élargissement spectaulaire du secteur public pour relancer l'économie française
b) Le tournant libéral des années 1980
Le tournant libéral des années 1980
En quinze ans, entre globalisation financière, développement de la libre concurrence et évolutions du droit communautaire, l’ensemble constitué par les entreprises françaises sous contrôle public a été considérablement remodelé. La mutation s’est avant tout traduite par une forte contraction. Fin 1986, 3 500 entreprises; fin 2000, plus que 1 500). Les entreprises publiques occupent 1,1 million de salariés en 2000 contre 2,35 millions en 1986.
Deux grandes phases de privatisations sont à l’origine de cette évolution. La première s’ouvre avec la loi du 2 juillet 1986 qui prévoit le transfert au secteur privé de 28 groupes ou sous-groupes publics. Du fait de ce transfert, 1 200 entreprises, employant 350 000 salariés, sortent du secteur public.
La loi du 19 juillet 1993 inaugure la deuxième phase de privatisations. Elle élargit le champ des entreprises privatisables en ajoutant 13 groupes ou sous-groupes publics à la liste des sociétés de 1986 non encore privatisées Entre 1993 et 2000, le transfert au secteur privé a concerné 1 800 entreprises, qui occupaient au total 508 000 salariés au moment de leur transfert.
Au cours de cette phase apparaît une autre modalité de transfert : l’ouverture du capital. Entre 1993 et 2000, Renault, Bull, Thomson Multimédia, France Télécom et Air France ont ainsi été partiellement privatisées. Le transfert partiel des trois premières sociétés a été prolongé par une privatisation.
1985-2000: Quinze années de mutations du secteur public d’entreprises, Insee, 2002
Le tournant libéral des années 1980
Depuis des décennies – certains diront même des siècles –, la tentation française par excellence a été celle du dirigisme d’État. Qu’il s’agisse de l’économie ou de l’éducation, de la culture ou de la recherche, des technologies nouvelles ou de la défense de l’environnement, c’est toujours vers l’État que s’est tourné le citoyen pour demander idées et subsides. Peu à peu, s’est ainsi construite une société administrée, et même collectivisée, où le pouvoir s’est concentré dans les mains d’experts formés à la gestion des grandes organisations. Ce système de gouvernement, qui est en même temps un modèle social, n’est pas dénué de qualités : il flatte notre goût national pour l’égalité ; il assure pérennité et stabilité au corps social ; il se concilie parfaitement avec le besoin de sécurité qui s’incarne dans l’État-Providence.
Mais il présente deux défauts rédhibitoires : il se détruit lui-même, par obésité ; et surtout, il menace d’amoindrir les libertés individuelles. Les Français ont compris les dangers du dirigisme étatique et n’en veulent plus.
Jacques Chirac, discours devant l’Assemblée nationale, 9 avril 1986
3. L’État face aux médias et à l’opinion publique
a) La vie politique française est de plus en plus médiatisée à partir des années 1970. Si de Gaulle comprend l’importance des médias (il utilise la télévision à 79 reprises en 11 ans de mandat) (document 1), c’est avec ses successeurs que la télévision devient le centre de la vie politique – depuis 1974, un débat télévisé oppose les deux candidats du deuxième tour de l’élection présidentielle – mais aussi un outil essentiel de la communication politique. Cette tendance s'est encore accentuée depuis les années 1990 avec la multiplication des médias (chaines d’information en continu, Internet, etc.) (document 2). Mais en même temps qu’ils deviennent nombreux, les médias deviennent aussi de plus en plus critiques vis-à-vis de l’action de l’État (document 3).
b) L’opinion publique pèse de plus en plus sur la vie politique. Le gouvernement, comme l’opposition, tente d’adapter sa conduite aux jugements des médias et aux résultats des sondages, censés exprimer les attentes et les préoccupations des Français, ce que certains dénoncent comme une véritable tyrannie (document 4). Mais plus leurs opinions s’expriment, plus les Français s’éloignent de la politique – ce que montre la croissance régulière de l’abstention – ou se défient des partis traditionnels : pour la première fois en 2002, le deuxième tour de l’élection présidentielle n’oppose pas deux candidats de la droite et de la gauche (document 5).
c) L’État doit s’adapter aux fluctuations de l’opinion. Alors que le début de la Ve République a été marqué par une grande stabilité, les dernières décennies font apparaître une instabilité croissante. Entre 1986 et 2002, trois expériences de « cohabitation » ont lieu à la suite d’élections législatives perdues par les partis au pouvoir : après Mitterrand contraint de gouverner avec Chirac en 1986, puis avec Balladur en 1993, Chirac doit gouverner avec Jospin de 1997 à 2002 (document 6). Pour mettre fin à ce qui est perçu comme une dénaturation des institutions de la Ve République, la durée du mandat présidentiel est alignée sur celle des députés de l’Assemblée par la réforme constitutionnelle de 2000. Depuis 2002, les élections législatives ont lieu tout de suite après les élections présidentielles (document 7).
Une médiatisation croissante de la vie politique
La présidence médiatique de de Gaulle
De Gaulle et les médias audiovisuels:
71 interventions entre 1958 et 1969
De Gaulle à la télévision
lors du putsch de 1961
Une médiatisation croissante de la vie politique
Le premier débat télévisé
de l'élection présidentielle en 1974
Une célèbre interview de Mitterrand en 1985:
le journaliste égal du président?
Les hommes politiques directement
interviewés par les Français
La télévision commentée en permanence
par les chaines d'information en continu
Une médiatisation croissante de la vie politique
Des médias de plus en plus critiques vis-à-vis de l’État
Une médiatisation croissante de la vie politique
Un exemple de média de plus en plus critique vis-à-vis de l’État:
Les Guignols de l'info, l'une des émissions- phare de Canal+ pendant les années 1990 et 2000
(Voir un des épisodes)
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Des sondages devenus omniprésents dans la vie politique
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Depuis 2002, les cotes de popularité font apparaître une impopularité croissante des présidents de la République. De plus en plus vite : pour Nicolas Sarkozy, il avait fallu attendre le mois de février 2008, pour François Hollande il n’aura pas fallu attendre plus de trois mois. Jusqu’alors, les cotes de popularité – bonnes ou mauvaises – étaient une sorte de décor où la politique nourrissait les commentaires sur la mauvaise humeur populaire et annonçaient de futures sanctions électorales. À l’automne 2013, la question a été enfin posée : peut-on gouverner en étant impopulaire ? Question presque risible au regard de l’histoire du monde, tant de pouvoirs ayant été impopulaires et ayant duré le temps d’une vie, voire d’une dynastie.
Les critiques avaient annoncé depuis longtemps la tentation d’ériger les sondages en vote permanent. Nous y sommes. La lutte démocratique impose la critique des dirigeants. C’est la règle du jeu. Avec la mise en question de la légitimité des gouvernements fraîchement élus, on est probablement entrés dans une nouvelle ère. Peut-être celle où nul ne pourra plus gouverner.
Seule la solidité monarchique des institutions – une fragilité quand le prince se mêle de tout et de rien – permet de résister comme si de rien n’était, ou presque, à l’assaut.
Alain Garrigou, Le Nouvel Observateur, 29 octobre 2013
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Une perte de confiance particulièrement marquée envers les institutions de l'État
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Une montée également régulière des votes « protestataires » :
le résultat du premier tour de l'élection présidentielle de 2002
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
Pourquoi y a-t-il eu cohabitation ou coexistence ? Au fond qu’est-ce qu’on nous disait ? Le président de la République – s’il y a une nouvelle majorité qui s’impose le 16 mars 1986 – se démet ou se soumet.
Or, quel est mon rôle ? Pourquoi les Français m’ont-ils élu ? Sans doute, parce que j’étais, en 1981, à la tête d’un vaste mouvement de gauche, parce que j’étais et, parce que je suis toujours, socialiste et qu’on avait voulu voir des socialistes à l’œuvre ; mais aussi parce qu’un président de la République devient tout aussitôt autre chose que le représentant d’un parti ou d’une fraction de l’opinion française : il devient le président de tous les Français. Et la Constitution, qui est notre loi suprême, oblige le président de la République à certaines fonctions, à un certain rôle. [...]
Le président de la République doit – je dois – assurer la continuité de l’État et le fonctionnement régulier des pouvoirs publics, c’est dans l’article 5 de la Constitution. On n’assure pas la continuité de l’État si, lorsqu’il y a un événement électoral, on s’en va. Cela n’est pas acceptable.
François Mitterrand, intervention télévisée du 29 mars 1987
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
J’ai décidé d’appeler les Français à se prononcer par référendum sur la réduction de la durée du mandat présidentiel. Cette réforme, dont j'ai pris l'initiative sur proposition du Premier ministre, est souhaitable et nécessaire.
En permettant à chacun de choisir, à intervalles plus rapprochés, celui ou celle qui doit présider aux destinées de la Nation, la réduction de sept à cinq ans du mandat présidentiel donnera à notre pays une meilleure respiration démocratique. Elle vous permettra de participer plus souvent, personnellement et directement, à notre débat public. À une époque marquée par des changements profonds et rapides, partout, en France, en Europe et dans le monde, elle adaptera nos Institutions aux rythmes de notre temps.
Il ne s'agit pas, vous le savez, de remettre en cause l'équilibre de nos Institutions. Les institutions qui ont fait la preuve de leur solidité, de leur souplesse, de leur adéquation au génie de notre peuple. Mais il s'agit de les adapter pour les rendre plus vivantes.
Jacques Chirac, Intervention télévisée du 6 juillet 2000
a) Une médiatisation croissante de la vie politique
Une médiatisation croissante de la vie politique
La présidence médiatique de de Gaulle
De Gaulle et les médias audiovisuels:
71 interventions entre 1958 et 1969
De Gaulle à la télévision
lors du putsch de 1961
Une médiatisation croissante de la vie politique
Le premier débat télévisé
de l'élection présidentielle en 1974
Une célèbre interview de Mitterrand en 1985:
le journaliste égal du président?
Les hommes politiques directement
interviewés par les Français
La télévision commentée en permanence
par les chaines d'information en continu
Une médiatisation croissante de la vie politique
Un exemple de média de plus en plus critique vis-à-vis de l’État:
Les Guignols de l'info, l'une des émissions- phare de Canal+ pendant les années 1990 et 2000
(Voir un des épisodes)
b) Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Des sondages devenus omniprésents dans la vie politique
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Depuis 2002, les cotes de popularité font apparaître une impopularité croissante des présidents de la République. De plus en plus vite : pour Nicolas Sarkozy, il avait fallu attendre le mois de février 2008, pour François Hollande il n’aura pas fallu attendre plus de trois mois. Jusqu’alors, les cotes de popularité – bonnes ou mauvaises – étaient une sorte de décor où la politique nourrissait les commentaires sur la mauvaise humeur populaire et annonçaient de futures sanctions électorales. À l’automne 2013, la question a été enfin posée : peut-on gouverner en étant impopulaire ? Question presque risible au regard de l’histoire du monde, tant de pouvoirs ayant été impopulaires et ayant duré le temps d’une vie, voire d’une dynastie.
Les critiques avaient annoncé depuis longtemps la tentation d’ériger les sondages en vote permanent. Nous y sommes. La lutte démocratique impose la critique des dirigeants. C’est la règle du jeu. Avec la mise en question de la légitimité des gouvernements fraîchement élus, on est probablement entrés dans une nouvelle ère. Peut-être celle où nul ne pourra plus gouverner.
Seule la solidité monarchique des institutions – une fragilité quand le prince se mêle de tout et de rien – permet de résister comme si de rien n’était, ou presque, à l’assaut.
Alain Garrigou, Le Nouvel Observateur, 29 octobre 2013
Une opinion publique de plus en plus présente et défiante
Une montée également régulière des votes « protestataires » :
le résultat du premier tour de l'élection présidentielle de 2002
c) L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
Pourquoi y a-t-il eu cohabitation ou coexistence ? Au fond qu’est-ce qu’on nous disait ? Le président de la République – s’il y a une nouvelle majorité qui s’impose le 16 mars 1986 – se démet ou se soumet.
Or, quel est mon rôle ? Pourquoi les Français m’ont-ils élu ? Sans doute, parce que j’étais, en 1981, à la tête d’un vaste mouvement de gauche, parce que j’étais et, parce que je suis toujours, socialiste et qu’on avait voulu voir des socialistes à l’œuvre ; mais aussi parce qu’un président de la République devient tout aussitôt autre chose que le représentant d’un parti ou d’une fraction de l’opinion française : il devient le président de tous les Français. Et la Constitution, qui est notre loi suprême, oblige le président de la République à certaines fonctions, à un certain rôle. [...]
Le président de la République doit – je dois – assurer la continuité de l’État et le fonctionnement régulier des pouvoirs publics, c’est dans l’article 5 de la Constitution. On n’assure pas la continuité de l’État si, lorsqu’il y a un événement électoral, on s’en va. Cela n’est pas acceptable.
François Mitterrand, intervention télévisée du 29 mars 1987
L’adaptation de l’État aux fluctuations de l’opinion
J’ai décidé d’appeler les Français à se prononcer par référendum sur la réduction de la durée du mandat présidentiel. Cette réforme, dont j'ai pris l'initiative sur proposition du Premier ministre, est souhaitable et nécessaire.
En permettant à chacun de choisir, à intervalles plus rapprochés, celui ou celle qui doit présider aux destinées de la Nation, la réduction de sept à cinq ans du mandat présidentiel donnera à notre pays une meilleure respiration démocratique. Elle vous permettra de participer plus souvent, personnellement et directement, à notre débat public. À une époque marquée par des changements profonds et rapides, partout, en France, en Europe et dans le monde, elle adaptera nos Institutions aux rythmes de notre temps.
Il ne s'agit pas, vous le savez, de remettre en cause l'équilibre de nos Institutions. Les institutions qui ont fait la preuve de leur solidité, de leur souplesse, de leur adéquation au génie de notre peuple. Mais il s'agit de les adapter pour les rendre plus vivantes.
Jacques Chirac, Intervention télévisée du 6 juillet 2000
III. L’État depuis les années 1990, entre les régions et l’Union Européenne
a) De larges compétences sont attribuées aux collectivités territoriales. En 1982, une première loi de décentralisation fait des communes, des départements et des régions des « collectivités territoriales » dirigées par des assemblées élues (les premières élections régionales ont lieu en 1986) et dotées de grands pouvoirs de décision jusque-là détenus par les préfets (document 1). A la suite de cette loi, l’État transfère aux départements et aux régions une large part de ses compétences, en matière d’éducation et de transport, notamment (document 2).
b) La décentralisation se poursuit jusqu’à aujourd’hui. En 2003, une réforme de la Constitution définit la France comme un « État décentralisé », tandis que champ des compétences des collectivités territoriales est encore élargi (document 3). La décentralisation est également approfondie par l’« intercommunalité » qui permet les regroupements de communes ou par la création des « euro-régions ». Elle profite aussi à l’outre-mer, avec la formation en 2003 des DROM-COM (départements-régions et collectivités d’outre-mer), dotés de pouvoirs plus larges que les anciens DOM-TOM (document 4). La dernière étape en date de la décentralisation est la réforme territoriale de 2015, qui réduit à 13 le nombre des régions françaises, afin de leur donner un poids comparable aux Länder allemands ou aux régions italiennes (document 5).
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Les départements et les régions de la France métropolitaine en 1982
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Article 1 - Les communes, les départements et les régions s'administrent librement par des conseils élus. Des lois détermineront la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État ainsi que la répartition des ressources publiques [...], et le développement de la participation des citoyens à la vie locale. [...] Article 59 - Les régions sont des collectivités territoriales. Elles sont administrées par un conseil régional élu au suffrage universel direct. Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région. Il a compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région et l'aménagement de son territoire et pour assurer la préservation de son identité, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des départements et des communes. [...] Article 65 - Le conseil régional peut décider avec l'autorisation du gouvernement d'organiser à des fins de concertation et dans le cadre de la coopération transfrontalière, des contacts réguliers avec des collectivités décentralisées étrangères ayant une frontière commune avec la région.
Loi du 2 mars 1982
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales en 1982
Une décentralisation toujours plus approfondie
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. »
Article 1er de la Constitution de 1958, révisé en 2003
Une décentralisation toujours plus approfondie
a. Loi du 12 juillet 1999, révisée en juillet 2010
Art. 14 - La communauté de communes est un établissement public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave.Elle a pour objet d'associer des communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace.
b. Loi du 13 août 2004 sur le transfert de nouvelles compétences
Art. 145 - Les communes et leurs groupements ont vocation à assurer, à égalité de droits avec la région et le département, les responsabilités qui sont exercées localement. [...] À l'initiative de la région et du département ou à leur demande, [ces groupements] peuvent participer à l'exercice de tout ou partie des compétences relevant de la responsabilité de l'une ou de l'autre de ces collectivités territoriales.
Une décentralisation toujours plus approfondie
L’outre-mer recomposé par la décentralisation: les DROM-COM
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Des nouvelles régions: la réforme territoriale de 2015
a) Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Les départements et les régions de la France métropolitaine en 1982
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Article 1 - Les communes, les départements et les régions s'administrent librement par des conseils élus. Des lois détermineront la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État ainsi que la répartition des ressources publiques [...], et le développement de la participation des citoyens à la vie locale. [...] Article 59 - Les régions sont des collectivités territoriales. Elles sont administrées par un conseil régional élu au suffrage universel direct. Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région. Il a compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région et l'aménagement de son territoire et pour assurer la préservation de son identité, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des départements et des communes. [...] Article 65 - Le conseil régional peut décider avec l'autorisation du gouvernement d'organiser à des fins de concertation et dans le cadre de la coopération transfrontalière, des contacts réguliers avec des collectivités décentralisées étrangères ayant une frontière commune avec la région.
Loi du 2 mars 1982
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales en 1982
b) Une décentralisation toujours plus approfondie
Une décentralisation toujours plus approfondie
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. »
Article 1er de la Constitution de 1958, révisé en 2003
Une décentralisation toujours plus approfondie
a. Loi du 12 juillet 1999, révisée en juillet 2010
Art. 14 - La communauté de communes est un établissement public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave.Elle a pour objet d'associer des communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace.
b. Loi du 13 août 2004 sur le transfert de nouvelles compétences
Art. 145 - Les communes et leurs groupements ont vocation à assurer, à égalité de droits avec la région et le département, les responsabilités qui sont exercées localement. [...] À l'initiative de la région et du département ou à leur demande, [ces groupements] peuvent participer à l'exercice de tout ou partie des compétences relevant de la responsabilité de l'une ou de l'autre de ces collectivités territoriales.
Des compétences croissantes pour les collectivités territoriales
Des nouvelles régions: la réforme territoriale de 2015
2. Le poids croissant de l’Union Européenne
a) La construction européenne entraine de nombreux abandons de souveraineté. Alors que la mise en place, depuis 1957,de la Communauté Économique Européenne a réduit le champ d’action de l’État, en imposant notamment le principe de libre circulation des biens et des capitaux, le traité de Maastricht signé en 1992 crée des institutions qui empiètent sur les institutions françaises (document 1) et qui imposent de déléguer de nombreuses compétences à l’Union Européenne : l’État perd ainsi des fonctions aussi importantes que le contrôle des frontières ou l’émission de la monnaie (document 2), tandis que plus de la moitié des lois aujourd’hui appliquées en France sont d’origine européenne.
b) Ces abandons suscitent de nombreuses contestations. Dénoncés notamment par de Gaulle dans les années 1960 (document 3), mais longtemps jugés bénéfiques par une grande partie de l’opinion publique, les transferts de compétences de l’État français aux institutions européennes sont de plus en plus critiqués, comme en témoignent la difficile adoption du traité de Maastricht (49% de « non » lors du referendum de 1992), le rejet de la Constitution européenne par plus de 54% des Français en 2005 (document 4) ou les succès croissants des discours « souverainistes », tels que ceux du Rassemblement National ou de La France Insoumise (document 5).
Des abandons de souveraineté importants
La création de la Communauté Économique Européenne à Rome, le 25 mars 1957
Des abandons de souveraineté importants
1. Les États membres considèrent leurs politiques économiques comme une question d'intérêt commun et les coordonnent au sein du Conseil1. [...]
2. Le Conseil, statuant sur recommandation de la Commission2, élabore les grandes orientations des politiques économiques des États membres et de la Communauté. [...]
3. Le Conseil, sur la base de rapports présentés par la Commission, surveille l’évolution économique dans chacun des Etats membres et dans la Communauté, ainsi que la conformité des politiques économiques avec les grandes orientations [...].
Article 104
2. La Commission surveille l’évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les États membres en vue de déceler les erreurs manifestes3. [...]
11. [Si un État ne donne pas suite aux recommandations] le Conseil peut :
- inviter la Banque européenne d'investissement à revoir sa politique de prêts à l’égard de l'État membre concerné ;
- [...] imposer des amendes d'un montant approprié.
Traité de Maastricht, 7 février 1992
1. Réunion des ministres de l'Économie des pays de l'Union.
2. Organisme chargé de préparer et d'exécuter les décisions du Conseil. Elle propose des recommandations.
3. Selon le traité, le déficit budgétaire ne doit pas dépasser 3 % du PIB et la dette publique 60 % du PIB
Des abandons de souveraineté importants
L’entrée en vigueur des accords de Schengen,
sur la libre circulation des personnes, le 26 mars 1995
L’entrée en vigueur de l’euro,
le 1er janvier 2002
Des abandons de souveraineté contestés
Construire l'Europe, c'est-à-dire l'unir, c'est évidemment quelque chose d'essentiel. Il est banal de le dire, pourquoi faudrait-il que ce grand foyer de la civilisation, de la force, de la raison, de la prospérité, étouffe sous sa propre cendre ? Seulement, dans un pareil domaine, il faut procéder, non pas suivant des rêves, mais d'après des réalités. Or, quelles sont les réalités de l'Europe ? Quels sont les piliers sur lesquels on peut la bâtir ?
En vérité, ce sont des États qui sont, certes, très différents les uns des autres, qui ont chacun son âme à soi, son Histoire à soi, sa langue à soi, ses malheurs, ses gloires, ses ambitions à soi, mais des Etats qui sont les seules entités qui aient le droit d'ordonner et l'autorité pour agir. Se figurer qu'on peut bâtir quelque chose qui soit efficace pour l'action et qui soit approuvé par les peuples en dehors et au-dessus des États, c'est une chimère. Assurément, en attendant qu'on ait pris corps à corps et dans son ensemble le problème de l'Europe, il est vrai qu'on a pu instituer certains organismes plus ou moins extranationaux. Ces organismes ont leur valeur technique, mais ils n'ont pas, ils ne peuvent pas avoir, d'autorité et, par conséquent, d'efficacité politique.
Charles de Gaulle, conférence de presse du 5 septembre 1960
Des abandons de souveraineté contestés
Affiches de la campagne du référendum sur la ratification du traité de Maastricht en 1992
Des abandons de souveraineté contestés
Affiches de la campagne du référendum
sur la ratification de la Constitution européenne en 2005
Des abandons de souveraineté contestés
Affiches de la France Insoumise et du Rassemblement National
en vue de la campagne des élections européennes de 2019
a) Des abandons de souveraineté importants
Des abandons de souveraineté importants
La création de la Communauté Économique Européenne à Rome, le 25 mars 1957
Des abandons de souveraineté importants
1. Les États membres considèrent leurs politiques économiques comme une question d'intérêt commun et les coordonnent au sein du Conseil1. [...]
2. Le Conseil, statuant sur recommandation de la Commission2, élabore les grandes orientations des politiques économiques des États membres et de la Communauté. [...]
3. Le Conseil, sur la base de rapports présentés par la Commission, surveille l’évolution économique dans chacun des Etats membres et dans la Communauté, ainsi que la conformité des politiques économiques avec les grandes orientations [...].
Article 104
2. La Commission surveille l’évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les États membres en vue de déceler les erreurs manifestes3. [...]
11. [Si un État ne donne pas suite aux recommandations] le Conseil peut :
- inviter la Banque européenne d'investissement à revoir sa politique de prêts à l’égard de l'État membre concerné ;
- [...] imposer des amendes d'un montant approprié.
Traité de Maastricht, 7 février 1992
1. Réunion des ministres de l'Économie des pays de l'Union.
2. Organisme chargé de préparer et d'exécuter les décisions du Conseil. Elle propose des recommandations.
3. Selon le traité, le déficit budgétaire ne doit pas dépasser 3 % du PIB et la dette publique 60 % du PIB
Des abandons de souveraineté importants
L’entrée en vigueur des accords de Schengen,
sur la libre circulation des personnes, le 26 mars 1995
L’entrée en vigueur de l’euro,
le 1er janvier 2002
b) Des abandons de souveraineté contestés
Des abandons de souveraineté contestés
Construire l'Europe, c'est-à-dire l'unir, c'est évidemment quelque chose d'essentiel. Il est banal de le dire, pourquoi faudrait-il que ce grand foyer de la civilisation, de la force, de la raison, de la prospérité, étouffe sous sa propre cendre ? Seulement, dans un pareil domaine, il faut procéder, non pas suivant des rêves, mais d'après des réalités. Or, quelles sont les réalités de l'Europe ? Quels sont les piliers sur lesquels on peut la bâtir ?
En vérité, ce sont des États qui sont, certes, très différents les uns des autres, qui ont chacun son âme à soi, son Histoire à soi, sa langue à soi, ses malheurs, ses gloires, ses ambitions à soi, mais des Etats qui sont les seules entités qui aient le droit d'ordonner et l'autorité pour agir. Se figurer qu'on peut bâtir quelque chose qui soit efficace pour l'action et qui soit approuvé par les peuples en dehors et au-dessus des États, c'est une chimère. Assurément, en attendant qu'on ait pris corps à corps et dans son ensemble le problème de l'Europe, il est vrai qu'on a pu instituer certains organismes plus ou moins extranationaux. Ces organismes ont leur valeur technique, mais ils n'ont pas, ils ne peuvent pas avoir, d'autorité et, par conséquent, d'efficacité politique.
Charles de Gaulle, conférence de presse du 5 septembre 1960
Des abandons de souveraineté contestés
Affiches de la France Insoumise et du Rassemblement National
en vue de la campagne des élections européennes de 2019
Conclusion: un recul de l'État à nuancer
Même s’il a considérablement perdu de son importance depuis les années 1950-1960, l’État reste un acteur majeur dans de très nombreux domaines. Non seulement, il conserve un rôle économique essentiel, par sa politique budgétaire, par ses investissements et par son soutien aux entreprises, mais il a toujours une action déterminante en matière de culture, de protection sociale ou d’éducation et il se donne sans cesse de nouvelles obligations, en matière d’environnement ou de santé publique, notamment. Avec des dépenses publiques représentant 55% de son PIB en 2016, la France est l’un des pays d’Europe où le poids de l’État reste le plus important.
Un recul de l'État qui reste très relatif
La dépense publique de la France, comparée à son PIB